La justice s’inscrit-elle désormais dans une opposition farouche à l’instrumentalisation de la délégation permanente de signature dont bénéficie le secrétaire général de la présidence de la République ? Tout porterait à le croire. Le 23 mai 2024, le tribunal de première instance de Maroua a interdit la tenue du congrès du président fondateur du Pcrn, Robert Kona qui devait se tenir du 25 au 26 mai 2024. Un camouflet pour Paul Atanga Nji, le ministre de l’Administration territoriale qui aurait fait pression sur les magistrats sous le prétexte de hautes instructions.
En effet, il y a quelques semaines, apprend-on Paul Atanga Nji aurait transmis au préfet du Diamaré une note lui demandant d’instruire aux magistrats en charge de l’affaire d’autoriser la tenue du Congrès de Robert Kona à Maroua sous prétexte qu’il s’agirait de hautes instructions.
Le préfet, fort de cette note, serait allé rencontrer le président du tribunal pour lui porter ces hautes instructions. Le magistrat surpris aurait donc demandé au préfet s’il s’agit d’un « dossier suivi». Le préfet lui aurait fait savoir qu’il n’est juste porteur de hautes instructions.
Au magistrat de lui répondre qu’il va se référer à sa hiérarchie qui n’est pas le ministre de l’Administration territoriale mais le ministre de la Justice. A en croire des sources dignes de foi, le dossier est donc transmis au ministre de la Justice, Laurent Esso. « Le ministre de la Justice est également surpris, n’ayant pas été informé d’une telle démarche concernant pourtant son département ministériel. C’est ainsi qu’il fait clairement savoir au président du tribunal qu’il n’existe aucune instruction à son niveau concernant le Pcrn et lui demande de dire le droit. Le congrès de Kona sera purement et simplement suspendu. Et ce jusqu’à la résolution du conflit juridique qui oppose ce dernier à Cabral Libi. Autant dire que la Justice a récupéré le dossier », se réjouit u cadre du Pcrn.
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Sauf que l’affaire Robert Kona ne serait en réalité qu’un épisode d’une stratégie globale de prise de contrôle et d’ingérence dans la vie des partis politiques. Mais, l’interdiction du congrès de Robert Kona doit également être vu comme un début de résistance des magistrats aux hautes instructions et ce en droite ligne de la récente sortie du ministre de la Justice.
En effet, dans un éditorial de la revue du ministère de la Justice, s’agissant des hautes instructions, Laurent Esso a tenu à demander aux magistrats de ne plus en tenir compte et de dire le droit. S’adressant aux magistrats et parlant des hautes instructions, il a indiqué : « Je les rassure s’il en est besoin, de ce qu’en aucun cas et en aucune circonstance, le Président du Conseil Supérieur de la Magistrature ne saurait leur demander de violer la loi », analyse un leader politique. Aucune étiquette pour cette publication.