Figure iconique en France, l’Abbé Pierre qui s’est illustré par son action envers les plus démunis, est accusé par des femmes d’agressions sexuelles entre la fin des années 1970 et 2005, selon un rapport indépendant publié mercredi, commandé par trois organisations qui poursuivent son œuvre.
Défenseur inlassable des sans-abri et des mal-logés, cofondateur du mouvement Emmaüs, résistant pendant la Seconde guerre mondiale, l’Abbé Pierre (1912-2007), de son vrai nom Henri Grouès, fut longtemps la personnalité préférée des Français.
Après « un témoignage faisant état d’une agression sexuelle commise par l’Abbé Pierre sur une femme« , un travail a été mené par un cabinet expert de la prévention des violences, Egaé, ont expliqué dans un communiqué Emmaüs International, Emmaüs France et la Fondation Abbé Pierre.
Il « a permis de recueillir les témoignages de sept femmes qui font état de comportements pouvant s’apparenter à des agressions sexuelles ou des faits de harcèlement sexuel commis par l’abbé Pierre entre la fin des années 1970 et 2005″, ajoutent les trois organisations, en précisant l’une de ces personnes « était mineure au moment des premiers faits ».
« Nous saluons le courage des personnes qui ont témoigné et permis, par leur parole, de mettre au jour ces réalités », soulignent-elles.
« Nous les croyons, nous savons que ces actes intolérables ont laissé des traces et nous nous tenons à leurs côtés », ajoutent-elles. « Ces révélations bouleversent nos structures » et « ces agissements changent profondément le regard que nous portons sur un homme connu avant tout pour son combat contre la pauvreté, la misère et l’exclusion ».
Dans son rapport, Egaé indique avoir entendu « 12 personnes dans le cadre de l’enquête, dont certaines n’ont pas été la cible de comportements » du prêtre, et avoir eu accès à « deux témoignages adressés fin juin 2024 à une personne d’Emmaüs International ».
Au total, le cabinet dit avoir été destinataire de témoignages de sept personnes « faisant état de violences subies par des femmes de la part de l’Abbé Pierre sur une période allant de la fin des années 1970 à l’année 2005. »
– « J’ai dit +non+ » –
Parmi les faits rapportés, « des comportements inadaptés d’ordre personnel, une proposition sexuelle, des propos répétés à connotation sexuelle, des tentatives de contacts physiques non sollicités, des contacts non sollicités sur les seins ».
Une des femmes rapporte ainsi que l’Abbé Pierre « s’est mis à lui tripoter le sein gauche » alors qu’elle se trouvait « au pied de l’escalier, un endroit de type sas ».
Elle raconte une autre scène dans un bureau, quelques années plus tard : « Je me suis avancée vers lui pour lui serrer la main. Il a essayé de m’attirer vers la fenêtre. Je lui ai dit +Non, Père+. Il m’a dit +J’en ai besoin+. J’ai dit +non+, il est parti. »
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Une autre femme raconte une fois où l’Abbé Pierre « pose ses mains sur (sa) poitrine, (ses) seins », pendant « qu’on parle du travail ».
Une autre indique qu’un jour, « au moment de lui dire au revoir, il a introduit sa langue dans (sa) bouche d’une façon brutale et totalement inattendue ».
De cette série d’entretiens ressort « une forme de sidération lors des faits », écrit l’autrice du rapport Caroline de Haas, qui pointe une « forme d’emprise alimentée par la différence d’âge, le statut de l’Abbé Pierre et une forme d’idolâtrie, ou la situation de subordination entre lui et les personnes ».
– « Honte » –
A la suite de ces récits, un dispositif de recueil de témoignages et d’accompagnement, « strictement confidentiel » pour les victimes ou les témoins « de comportements inacceptables de la part de l’Abbé Pierre », a été mis en place, selon les trois associations.
Selon une source interne à Emmaüs, aucun signalement à la justice n’a été fait à ce stade.
A la suite de ces révélations, la Conférence des évêques de France a exprimé sa « douleur » et sa « honte ».
« Quand nous avons reçu le premier témoignage … ça a été un choc terrible. C’était une déflagration », a réagi dans la soirée le délégué général de la Fondation Abbé Pierre, Christophe Robert. « Mais on s’est dit » qu’il fallait « faire la lumière », « donner la parole à ces victimes (…).
Source: Agence France-Presse Aucune étiquette pour cette publication.