Les habitants de Soumy, dans le nord-est de l’Ukraine, étaient en deuil lundi au lendemain d’une frappe de missiles russe qui y a fait au moins 35 morts, Moscou rejetant les accusations en affirmant avoir visé une réunion de l’armée ukrainienne et accusant Kiev d’utiliser la population civile comme « bouclier humain ».
Ce bombardement a fait, selon les autorités locales, au moins 35 morts, dont deux mineurs, et 117 blessés dans le centre de Soumy, qui comptait 250.000 habitants avant la guerre et qui est située à une trentaine de kilomètres de la frontière russe.
Sur place lundi, au lendemain de l’attaque russe, les services de secours continuaient de déblayer les décombres d’un bâtiment universitaire détruit, à côté duquel des habitants sont allés déposer des fleurs, ont constaté des journalistes de l’AFP.
« Nous avions l’habitude de passer ici tout le temps », raconte Igor Kolochtchouk, 32 ans, venu se recueillir devant un mémorial improvisé avec sa femme Tetiana, qui dit ressentir « un choc, de l’incompréhension et probablement de la haine ».
Les habitants de Soumy, région frontalière de celle, russe, de Koursk où les combats se déroulent depuis une offensive ukrainienne à l’été 2024, s’étaient habitués aux frappes, explique cette enseignante de maternelle de 31 ans.
« Mais quand de telles tragédies se produisent, il est impossible de s’y habituer », lance-t-elle.
Artem Selianine, un infirmier de 47 ans, raconte s’être porté au secours immédiatement lundi. « Il y avait des premiers blessés dès le premier impact, qui a frappé la salle des congrès. Pendant que nous nous occupions d’eux, le deuxième tir est arrivé », raconte-t-il.
« C’était le chaos, il y avait des tonnes de cadavres. Des civils », dit-il.
– « Cible militaire », selon Moscou –
Le ministère russe de la Défense a affirmé de son côté dans un communiqué lundi que ses forces avaient tiré deux missiles balistiques Iskander sur « les lieux d’une réunion du commandement » d’un groupement de l’armée ukrainienne à Soumy.
L’Ukraine « continue d’utiliser la population ukrainienne comme bouclier humain, en plaçant des installations militaires ou en organisant des événements auxquels participent des militaires dans le centre d’une ville densément peuplée », a ajouté le ministère russe.
Avec cette accusation, la Russie reconnaît ainsi à mi-mots que ce bombardement a atteint des civils.
Mais elle nie toujours s’en prendre à eux à dessein. De nombreuses localités ukrainiennes ont pourtant été pilonnées et des dizaines de milliers de civils tués ou blessés, selon des observateurs, depuis le début de l’invasion en février 2022.
« Nos militaires frappent exclusivement des cibles militaires » ou liées à l’armée, a assuré le porte-parole de la présidence russe, Dmitri Peskov, interrogé sur les événements de Soumy au cours d’un briefing auquel participe l’AFP.
La députée ukrainienne Mariana Bezougla, connue pour ses critiques contre l’état-major de l’armée, a accusé sur Telegram les militaires d’avoir organisé le jour de la frappe dans le centre des congrès de Soumy, l’un des bâtiments touchés, une remise de décorations destinées à la 117e brigade de défense territoriale.
L’un des invités à cette cérémonie, le maire de Konotop, Artem Semenikhine, a confirmé cette information au média ukrainien Suspilne.
Un drone a en outre fait un blessé lundi dans cette même cité, selon son maire par intérim, Artem Kobzar. Une autre attaque a provoqué la mort de quatre civils dans la région voisine de Kharkiv, d’après son gouverneur.
Côté russe, des bombardements ukrainiens ont tué trois civils lundi dans la région de Koursk, selon son gouverneur Alexandre Khinchteïn.
Zelensky dénonce l’absence de « réponse » américaine au « refus » d’une trêve par Poutine
– « Imposer un cessez-le-feu » –
La frappe dimanche sur Soumy s’est produite deux jours après la visite en Russie de Steve Witkoff, émissaire de Donald Trump, qui avait rencontré vendredi Vladimir Poutine, pour la troisième fois depuis février.
Dmitri Peskov a jugé lundi que de tels contacts étaient « extrêmement utiles et très efficaces ». Il a fait l’éloge d’un canal de communication permettant aux présidents russe et américain d’échanger directement sur « différents éléments de leurs positions ».
En mars, les Américains avaient proposé un cessez-le-feu inconditionnel, sans convaincre Vladimir Poutine, et ce projet de trêve de 30 jours, accepté par Kiev, ne s’est pas concrétisé.
La frappe à Soumy a été fermement condamnée par les pays occidentaux.
La France l’a dénoncée lundi avec « la plus grande fermeté », promettant de « travailler à l’adoption de mesures fortes pour imposer un cessez-le-feu à la Russie ».
Donald Trump, qui a tendu la main à Vladimir Poutine depuis qu’il a pris ses fonctions en janvier, a estimé dimanche que ce ce bombardement était « horrible ».
« Je pense que c’est terrible. Et l’on m’a dit qu’ils ont fait une erreur », a-t-il dit, sans préciser à qui il faisait référence.
Lundi, il a assuré sur son réseau Truth Social « travailler assidûment pour que la mort et la destruction s’arrêtent ».
Source : Agence France-Presse