L’ANC, au pouvoir en Afrique du Sud depuis trente ans mais fragilisé en amont des législatives mercredi, mise sur son dernier grand meeting samedi pour rallier les indécis, jouant sur la carte sensible des progrès accomplis depuis la fin de l’apartheid.
« Nous ferons davantage et nous ferons mieux », a promis le président Cyril Ramaphosa devant des dizaines de milliers de partisans en jaune et vert dans un stade entre Soweto, township célèbre pour son implication dans la lutte contre l’apartheid, et Johannesburg, capitale économique du pays.
Quelque 27,6 millions d’inscrits devront décider, selon lui, « si le pays continue d’avancer ou fait marche arrière vers son passé terrible ». Il a répété, comme la veille lors d’une déambulation dans les rues de Soweto, qu’une victoire du Congrès national africain (ANC) était inéluctable.
Pourtant, selon les sondages, le parti au pouvoir risque de perdre pour la première fois de son histoire sa majorité parlementaire, étant crédité entre 40 et 46% des intentions de vote. Ce qui l’obligerait à forger des alliances pour se maintenir au pouvoir, car c’est le Parlement fraîchement élu qui désignera le prochain président en juin.
Nkululeko Sibeko, 37 ans, venu avec sa petite amie, explique qu’il est « important d’être là cette fois » car « l’ANC est vraiment en difficulté ».
« Il faut leur donner une autre chance », plaide-t-il, reconnaissant que certains responsables « se sont mal comportés », allusion à la corruption qui gangrène le parti au pouvoir depuis l’élection de Nelson Mandela en 1994.
Pour lui, le plus grand échec du président Ramaphosa, 71 ans, c’est son incapacité à fournir des services de base, pannes d’électricité et pénuries d’eau affligeant la plupart des Sud-Africains.
Nomea Njeto, chômeuse de 53 ans qui vit dans un logement social, retient surtout sa dette de gratitude à l’égard de l’ancien mouvement de libération, qui a débarrassé la population noire du système raciste et brutal de l’apartheid.
« Au moins, ils essayent d’améliorer nos vies », confie-t-elle. Avant, « c’était tellement triste et douloureux. Nous n’avions rien. Maintenant, au moins, j’ai une adresse », ajoute-t-elle, lunettes noires et dreadlocks.
– « L’ANC, mon deuxième Dieu » –
Alors oui, « ils ne font pas tout bien » mais « ils ont surtout fait de bonnes choses », insiste-t-elle.
Même ferveur chez Katherine Mzuza, 48 ans: « L’ANC est mon deuxième Dieu. J’ai grandi avec eux, mon sang est jaune et vert ».
« Nous avons des maisons, des écoles, des centres de soins gratuits, tout ça grâce à l’ANC », plaide-t-elle, même si beaucoup de ses concitoyens se plaignent d’un service public en mauvais état.
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Une cinquantaine de partis sont en lice mercredi et l’opposition mettait aussi le paquet, lors de ce dernier week-end de campagne.
Les Combattants pour la liberté économique (EFF, gauche radicale) se sont retrouvés samedi en rouge autour de son leader provocateur Julius Malema à Polokwane (nord-est).
Le parti, qui mise sur le désenchantement croissant des pauvres avec 10% d’intentions de vote, a fait voler un hélicoptère arborant son drapeau au-dessus du stade.
Et l’Alliance démocratique (DA, centre), premier parti d’opposition avec quelque 25% d’intentions de vote, tiendra son dernier grand rassemblement dimanche, en bleu, dans la banlieue de Johannesburg. Son slogan: « Sauver l’Afrique du Sud ».
La campagne a cependant largement été accaparée par l’ex-président Jacob Zuma, 82 ans, ancien pilier de l’ANC et ennemi juré du flegmatique Ramaphosa, dont le parti récemment créé a suscité la surprise en affichant dans les sondages jusqu’à 14% des intentions de vote.
Il tiendra son dernier meeting dimanche dans la province du Mpumalanga (est), bastion traditionnel de l’ANC.
Tête de liste d’un parti populiste, baptisé du nom de la branche armée de l’ANC sous l’apartheid, Umkhonto We Sizwe (MK), Zuma a été déclaré inéligible, en raison d’une condamnation en 2021. Sa photo apparaîtra toutefois sur les bulletins de vote, déjà imprimés.
Source: Agence France-Presse