Après plus d’un mois de guerre avec Israël, le Hezbollah se dit prêt à accepter un cessez-le-feu sous conditions, mais pour le mouvement islamiste libanais, soutenu par l’Iran, certaines concessions restent impossibles.
Reconnaissant des « coups douloureux » portés par Israël, le nouveau chef du Hezbollah, Naïm Qassem, a estimé mercredi que le mouvement pourrait accepter un cessez-le-feu « aux conditions » qu’il juge « convenables ».
Le jour même, le Premier ministre libanais Najib Mikati assurait que l’émissaire américain Amos Hochstein lui avait laissé entendre qu’un cessez-le-feu était possible avant l’élection présidentielle américaine du 5 novembre.
Une telle accalmie serait cruciale pour le Hezbollah, après des semaines de frappes israéliennes sur ses bastions, qui ont tué plusieurs de ses hauts dirigeants.
L’armée israélienne annonce avoir tué un commandant du Hezbollah au Liban
Un cessez-le-feu est une « priorité » pour le Hezbollah, afin qu’il puisse « réorganiser ses rangs », a déclaré à l’AFP l’analyste Qassim Qassir, proche du mouvement chiite.
« Il peut accepter un déploiement de l’armée » libanaise dans le sud du Liban, frontalier du nord d’Israël, « et rester loin de la frontière, mais rien de plus », nuance-t-il, le Hezbollah étant appelé à s’éloigner au nord du fleuve Litani, soit à trente kilomètres au nord de la Ligne bleue, qui marque la frontière entre le Liban et Israël.
Le Hezbollah « a été considérablement affaibli, si ce n’est éliminé, et dans le contexte actuel il lui sera très difficile de se reconstruire », confirme Maha Yahya, à la tête du centre Carnegie pour le Moyen-Orient.
Ces dernières semaines, le mouvement a accumulé les coups durs.
– « Retrait de combattants » –
Après une année de tirs transfrontaliers en marge de la guerre dans la bande de Gaza entre Israël et le Hamas, dont le Hezbollah est un allié, le conflit larvé au Liban s’est transformé en guerre ouverte le 23 septembre.
Les bombardements intensifs d’Israël ont assassiné l’ancien chef tout-puissant du Hezbollah, Hassan Nasrallah, et son successeur pressenti Hachem Safieddine, créant un vide au sommet du pouvoir.
Sur le champ de bataille, les soldats israéliens poursuivent des incursions terrestres, parvenant jusqu’à la localité de Khiam, à six kilomètres au-delà de la frontière. Même si le Hezbollah assure que les forces israéliennes n’ont réussi à prendre le contrôle total d’aucun village.
Pluie de roquettes du Hezbollah sur Israël pour venger un de ses commandants
Même dans l’est du Liban, à la frontière avec la Syrie, le Hezbollah est sous pression. L’armée israélienne a bombardé deux postes-frontières, utilisés selon elle par le mouvement pour acheminer au Liban son arsenal fourni par l’Iran.
Illustrant un premier pas vers un compromis, le Premier ministre libanais a indiqué que le Hezbollah ne liait plus les combats au Liban à la guerre à Gaza.
Officiellement toutefois, le mouvement n’a pas annoncé changer de position, alors qu’il conditionne un arrêt de ses tirs vers Israël à la fin de l’offensive israélienne à Gaza.
M. Mikati a assuré que les ministres du Hezbollah au sein de son gouvernement démissionnaire étaient favorables à la mise en oeuvre de la résolution 1701 de l’ONU, qui avait acté en 2006 la fin de la précédente guerre contre Israël et stipule que seuls l’armée libanaise et les Casques bleus de l’ONU peuvent être déployés dans le sud du Liban.
« Le Hezbollah se dirige vers un point où il pourrait accepter la mise en oeuvre de la résolution 1701 », reconnaît David Wood, spécialiste du Liban au think-tank International Crisis Group.
Il pourrait « être disposé à un retrait de ses combattants et de ses infrastructures » jusqu’au nord du fleuve Litani, a-t-il ajouté.
– « Enorme pression » –
« Il y a une énorme pression sur le Hezbollah (…) pour mettre un terme au carnage », résume M. Wood, de la part de ses rivaux politiques et de sa propre base.
« Cela explique pourquoi il est plus ouvert à des négociations de cessez-le-feu », mais « pas à n’importe quelles conditions », nuance-t-il.
Le mouvement poursuit d’ailleurs ses tirs de drones et de roquettes contre Israël.
Le Hezbollah « a toujours le sentiment d’avoir une place à la table des négociations pour un règlement sans reddition totale », indique M. Wood.
L’armée israélienne annonce avoir « approuvé » des plans d’offensive au Liban
Ex-coordinateur du gouvernement libanais auprès de la Finul, la force de maintien de la paix de l’ONU, Mounir Chehadeh assure qu’Israël a « violé » la résolution 1701 avant même le début de la guerre en cours.
Depuis 2006, des accrochages sporadiques et des violations de la part des deux camps ont été constatées, mais la résolution a toutefois permis d’instaurer un calme précaire entre le Hezbollah et Israël sur le sol libanais. Le mouvement chiite a maintenu une présence dans la région, où il a, selon des experts, creusé un important réseau de tunnels.
Autre obstacle, et de taille: les combattants du Hezbollah « sont les enfants du sud« , souligne M. Chehadeh, rappelant ainsi que le sud du Liban, à majorité chiite, est un important bastion du mouvement. « Quelqu’un qui est né et a grandi dans ces villages, qui a sa famille et ses intérêts là-bas, comment peut-on lui demander de partir vers le nord du Litani? », s’interroge-t-il.
Source: Agence France-Presse