Le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, a « marqué des points » avec l’élimination du chef du Hamas, Ismaïl Haniyeh, une « récompense de guerre » aux conséquence incertaines en raison des risques d’escalade, ont déclaré des experts mercredi à l’AFP.
Plus tôt dans la journée, le Hamas et les Gardiens de la révolution, l’armée idéologique de la République islamique d’Iran, ont annoncé que M. Haniyeh avait été tué par une frappe aérienne israélienne à Téhéran où il était venu assister à l’investiture du nouveau président iranien. Israël n’a fait aucune déclaration à ce sujet jusqu’ici.
L’annonce de la mort du chef du Hamas, qui a suscité une vague de réactions à travers le monde, intervient après bientôt dix mois de guerre dans la bande de Gaza, déclenchée par Israël qui a juré de détruire le mouvement islamiste palestinien après son attaque sanglante sur le sol israélien le 7 octobre.
Pour M. Netanyahu, « il ne s’agit pas d’une victoire stratégique mais tactique, il a gagné des points mais ça peut très vite changer », explique à l’AFP Asher Cohen, professeur de sciences politiques à l’université de Bar Ilan (centre).
– « Reprendre la main » –
Aux yeux d’Abboud Hamayel, un analyste palestinien à l’Université de Birzeit, les éliminations ciblées par Israël de personnalités considérées comme un danger pour sa sécurité « servent des objectifs plutôt politiques que stratégiques ».
Il s’agit « davantage de mécanismes pour galvaniser sa propre société que de véritablement modifier la position politique ou militaire de ses adversaires », a écrit M. Hamayel sur le réseau social X.
« Comme le soutien à Israël s’effiloche, une grosse opération comme celle de la nuit dernière (ciblant Haniyeh) permet à Netanyahu de reprendre la main », observe Agnès Levallois, de l’Institut de recherche et d’études sur la Méditerranée et le Moyen-Orient à Paris, à un moment où « des voix s’élèvent pour demander à Israël d’arrêter son offensive à Gaza », dit-elle à l’AFP.
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Peu avant « l’assassinat » de Haniyeh à Téhéran, Israël avait annoncé mardi soir avoir « éliminé le plus haut responsable militaire de l’organisation terroriste Hezbollah, Fouad Chok », dans une frappe sur l’immeuble où il se trouvait dans la banlieue de Beyrouth au Liban.
« Comme il ne peut pas y avoir une grosse opération au Liban, parce que je pense qu’ils ne veulent pas déclencher une guerre au Liban à la frontière avec Israël, cette opération permet de toucher le soutien du Hezbollah qui est l’Iran », explique Mme Levallois. « Et Netanyahu a besoin depuis le début (de la guerre à Gaza) d’une récompense de guerre significative », ce qui est le cas en particulier avec Haniyeh, dit-elle.
« En supprimant Haniyeh maintenant, il est difficile de voir comment cela produira autre chose qu’une radicalisation plus poussée au sein du mouvement », a déclaré à l’AFP Hugo Lovatt, analyste au Conseil européen des relations étrangères, ajoutant que Haniyeh « représentait un courant plus modéré et pragmatique » au sein du Hamas.
– « Hors de question » –
« A tout le moins, cela signifierait qu’un accord de cessez-le-feu avec Israël est désormais totalement hors de question », a-t-il ajouté.
Depuis l’attaque du 7 octobre, Israël a juré de détruire le Hamas, qu’il classe comme organisation terroriste à l’instar des Etats-Unis et de l’Union européenne. Ce jour-là, des commandos du Hamas infiltrés depuis Gaza dans le sud d’Israël ont mené une attaque qui a entraîné la mort de 1.197 personnes, en majorité des civils, selon un décompte de l’AFP établi à partir de données officielles israéliennes. Sur 251 personnes alors enlevées, 111 sont toujours retenues à Gaza, dont 39 sont mortes, selon l’armée.
En riposte, Israël a lancé une offensive d’envergure qui a fait plus de 39.445 morts dans la bande de Gaza, selon des données du ministère de la Santé du gouvernement de Gaza, dirigé par le Hamas, qui ne donne pas d’indications sur le nombre de civils et de combattants morts.
Interrogé sur les conséquences de ces éliminations ciblées sur les relations d’Israël avec les Etats-Unis et la communauté internationale, M. Cohen rappelle qu’en ce qui concerne le chef militaire du Hezbollah, « sa tête était mise à prix par les Américains ».
Pour l’élimination du dirigeant du Hamas, M. Cohen est convaincu que « ça ne peut pas compliquer les relations internationales du pays car il n’y a pas d’enjeu humanitaire, des civils n’ont pas été touchés, juste des chefs terroristes ».
Source: Agence France-Presse Aucune étiquette pour cette publication.