Malgré un engagement sans relâche depuis près d’un an, la diplomatie américaine semble impuissante à peser sur l’allié israélien, qui reste sourd aux appels à la désescalade au Liban.
Le président Joe Biden, qui participera mardi et mercredi à New York à sa dernière Assemblée générale de l’ONU, a assuré lundi qu’il « travaillait à une désescalade » au Liban, où l’armée israélienne multiplie les frappes meurtrières faisant des centaines de morts, dont des enfants.
« Nous travaillons à une désescalade qui permettrait aux gens de regagner leur maison en toute sécurité » dans le nord d’Israël, que des dizaines de milliers d’habitants ont dû fuir en raison de tirs du Hezbollah pro-iranien, a dit le chef de l’Etat américain en recevant à la Maison Blanche son homologue émirati Mohammed ben Zayed al-Nahyane. Le Hezbollah affirme agir pour soutenir le Hamas palestinien à Gaza, qui a lancé une attaque meurtrière sans précédent contre le sud d’Israël le 7 octobre.
Un responsable américain a expliqué que Washington présenterait lors de l’Assemblée générale des idées « concrètes » pour faire baisser la tension à la frontière entre Israël et le Liban et trouver une issue diplomatique au conflit.
– Accélération –
Mais les évènements semblent s’accélérer sans que les Etats-Unis ne puissent grand chose, à défaut de recourir à leur principal moyen de pression sur leur allié, à savoir la livraison d’armes.
Fervent soutien d’Israël, Joe Biden s’est jusqu’alors refusé à user de ce levier en dehors de la suspension d’une livraison de bombes en mai et il semble peu probable qu’il change de stratégie à l’approche de l’élection présidentielle du 5 novembre.
Les Etats-Unis ont, dans le même temps, annoncé lundi l’envoi d' »un petit nombre » d’effectifs militaires supplémentaires au Moyen-Orient en réponse à la montée des tensions régionales.
Les Etats-Unis ont déployé des milliers de soldats dans la région ainsi que des navires militaires, des avions de combat et des systèmes de défense aérienne destinés à protéger Israël et les forces américaines sur place.
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Alors que le front de la guerre s’est déplacé ces derniers jours vers le Liban, le Hezbollah, soutenu Téhéran, a promis de continuer à attaquer Israël « jusqu’à la fin de l’agression à Gaza », territoire palestinien assiégé et ravagé par la guerre consécutive à l’attaque du 7 octobre.
Les échanges de tirs entre Israël et le Hezbollah ont gagné en intensité depuis la vague d’explosions spectaculaires des appareils de transmission du mouvement chiite, attribuée à Israël.
Les Etats-Unis ont déclaré qu’ils n’en avaient pas eu connaissance au préalable, tout en appelant au calme, visant également l’Iran.
Israël a, au contraire, intensifié ses attaques.
Comble de l’affront, l’attaque aux bipeurs la semaine dernière est survenue en pleine visite du secrétaire d’Etat américain, Antony Blinken, au Caire, lui qui s’efforçait de relancer les négociations pour obtenir un cessez-le-feu et la libération des otages retenus par le Hamas dans la bande de Gaza.
– Elections américaines –
A Washington, des responsables américains ne cachent pas en privé leur frustration avec le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu qui n’en ferait qu’à sa tête, jouant sa propre survie politique.
Ce dernier a affirmé qu’Israël était en train d’inverser le « rapport de forces » dans le sud du Liban.
« La politique d’Israël n’est pas d’attendre les menaces mais de les anticiper, ce que nous faisons », a-t-il dit.
Pour Michael Hanna, directeur de programme à l’International Crisis Group, la diplomatie américaine a tout misé, sans succès, sur la conclusion d’un accord de cessez-le-feu à Gaza, seul moyen selon elle de parvenir à une solution dans le nord d’Israël.
Mais cela « semble être dans une impasse, et les efforts pour découpler les deux – pour parvenir à un accord entre le Hezbollah et Israël alors que la guerre à Gaza se poursuit – se sont également avérés être une impasse », dit-il.
Le calendrier politique américain vient compliquer les choses, alors que la vice-présidente Kamala Harris, qui a pris au pied levé la place de Joe Biden après le retrait fracassant de ce dernier de la campagne, est engagée dans une course difficile contre l’ancien président républicain Donald Trump.
L’administration Biden se désespère d’arracher un accord à Gaza avant la présidentielle afin d’éviter une guerre totale et l’impression de chaos, mais peu d’observateurs croient qu’elle est prête à prendre des mesures drastiques, comme sur les armes, si près du scrutin.
« Il n’est pas particulièrement exagéré d’imaginer que le calendrier politique américain ait pu jouer un rôle dans la prise de décision israélienne quant au moment choisi d’étendre » le conflit au Liban, avance M. Hanna.
Source: Agence France-Presse