Le Kremlin a déclaré jeudi que le changement de doctrine russe concernant le recours à l’arme nucléaire, annoncé la veille par Vladimir Poutine, devait être considéré comme un « signal » pour les Occidentaux, avec qui les tensions sont au plus haut depuis l’offensive en Ukraine en février 2022.
Le président russe a prévenu mercredi que son pays pourrait utiliser l’arme nucléaire en cas de « lancement massif » d’attaques aériennes et que tout assaut mené par un pays non-nucléaire mais soutenu par une puissance disposant de l’arme atomique pourrait être considéré comme une agression « conjointe ».
L’Ukraine tente actuellement de convaincre ses alliés de la laisser utiliser des missiles de longue portée contre le territoire russe, une perspective qui a déjà conduit des responsables russes à menacer l’Occident de frappes nucléaires.
Le changement de doctrine est « un signal qui met en garde ces pays contre les conséquences d’une participation à une attaque contre notre pays avec divers moyens, pas nécessairement nucléaires », a déclaré le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov.
Il répondait à une question sur la façon dont les pays « inamicaux » devraient voir ce changement, terme utilisé pour désigner les nations occidentales soutenant Kiev.
« Bien sûr, la dissuasion nucléaire est ajustée pour prendre en compte les éléments de tensions qui se développent à nos frontières », a ajouté Dmitri Peskov, une allusion claire à l’Ukraine.
– « Nouvelles menaces » selon Poutine –
Vladimir Poutine a justifié les modifications proposées mercredi par « l’émergence de nouvelles sources de menaces et de risques militaires pour la Russie et ses alliés ». L’adoption de cette nouvelle doctrine n’a pas été encore formalisée.
Selon M. Poutine, la Russie pourrait envisager un recours à l’arme nucléaire « si nous recevons des informations fiables sur le lancement massif de moyens d’attaque aérospatiaux et leur franchissement de la frontière de notre Etat », a-t-il mis en garde.
Vladimir Poutine a souligné que cela comprenait notamment l’aviation « stratégique et tactique », les missiles ou même les drones.
« Nous nous réservons le droit d’utiliser des armes nucléaires en cas d’agression contre la Russie ou le Bélarus », son très proche allié, a ajouté le président russe.
Dmitri Peskov a en revanche affirmé que la réunion de mercredi ne portait pas sur l’expansion de l’arsenal nucléaire russe.
A lire: Poutine agite de nouveau la menace nucléaire face aux Occidentaux
A Moscou, des habitants interrogés jeudi par l’AFP se disaient inquiets. « Utiliser la menace de l’arme nucléaire, c’est toujours mal. On n’a pas besoin d’une nouvelle crise de Cuba », déclare Dmitri, un étudiant de 21 ans refusant de donner son nom de famille.
« Une escalade est en cours, bien sûr, c’est alarmant », approuve Vadim, un artiste de 43 ans, refusant également de donner son nom.
Vladimir, un retraité de 60 ans, estime lui que cette nouvelle doctrine peut être bénéfique en faisant « un peu entrendre raison à des Européens prétentieux ».
« Je pense que cela (la nouvelle doctrine) va renforcer la sécurité et obliger les gens en Ukraine et les Etats-Unis à réfléchir », abonde Igor Diakov, un autre retraité moscovite.
« Et l’Europe va trembler parce que toutes les lignes rouges ont été franchies et qu’ils pensent qu’ils ne peuvent pas être punis. Mais avec nous, cela ne se passera pas comme ça ! », lance-t-il.
Enfin, Tatiana Nikiforova, une professeure de russe de 49 ans, s’en remet elle entièrement au jugement du Kremlin : « Nous devons avoir confiance en nos dirigeants, il ne peut en être autrement. »
Source: Agence France-Presse