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Des soldats malgaches rejoignent les milliers de manifestants à Antananarivo

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Trans Afrique

Des soldats malgaches ont rejoint samedi les milliers de manifestants dans les rues de la capitale Antananarivo, appelant les forces de sécurité à « refuser les ordres de tirer » sur la population et condamnant la répression policière récente.

La manifestation de samedi à Antananarivo a été l’une des plus importantes depuis le début de la contestation le 25 septembre, lancée par le mouvement Gen Z pour protester contre les coupures d’eau et d’électricité et qui s’est mutée en une remise en cause des responsables politiques au pouvoir, à commencer par le président Andry Rajoelina.

Samedi soir, le nouveau Premier ministre Ruphin Zafisambo a assuré que le gouvernement, « qui se maintient fermement », était « prêt à collaborer et à écouter toutes les forces : les jeunes, les syndicats et l’armée ».

« Madagascar ne pourra pas résister à d’autres crises si cette division entre les citoyens persiste », a poursuivi le général Zafisambo dans un bref discours filmé.

– La rue reprend le pouvoir, l’armée entre dans la danse –

De son côté, la présidence a publié un communiqué assurant que le président Andry Rajoelina « reste dans le pays » et « continue de gérer les affaires nationales ».

La police a utilisé samedi des gaz lacrymogènes et des grenades assourdissantes pour disperser la foule dans la capitale. Une partie des policiers s’est retirée.

Des soldats ont fait leur entrée dans la ville à bord de véhicules militaires. Certains agitaient des drapeaux malgaches.

Ils ont rejoint la foule dans la rue. Les manifestants les ont accueillis avec des saluts et des « mercis ».

Ce moment marque un basculement. L’armée dissidente ne se contente plus d’appeler à la désobéissance : elle se mêle physiquement à la contestation.

La scène est symbolique. Elle transforme la rue en espace partagé entre civils et militaires. Elle brouille les lignes entre pouvoir et résistance.

L’unité affichée entre soldats et manifestants renforce la pression sur le gouvernement. Elle donne à la mobilisation une nouvelle légitimité, à la fois populaire et armée.

« Nous n’avons pas d’armes. Nous essayons de nous protéger avec des pierres contre les gaz lacrymogènes qu’ils nous lancent. Et maintenant, nous ressentons une grande fierté », a confié Lucie, 24 ans.

Une fois la police partie, la foule a avancé. Elle a rejoint la Place du 13 Mai, devant l’hôtel de ville d’Antananarivo.

– Tensions croissantes entre forces armées et pouvoir central –

Sur le terrain, le colonel Michael Randrianirina, du CAPSAT, accuse la police d’avoir ouvert le feu sur ses hommes. Un journaliste a été blessé à la fesse. Un soldat est mort.

Le ton est monté d’un cran. « À tous ceux qui ont envoyé les gendarmes ici — le chef de la gendarmerie, le Premier ministre, le président — vous devez partir », a-t-il lancé.

Selon des médias locaux, les services de secours ont fait état de deux morts et de 26 blessés samedi.

Des journalistes de l’AFP ont entendu des coups de feu pendant la manifestation. Des tirs et des explosions étaient encore entendus dans le centre de la capitale à la nuit tombée.

Avant de quitter leur base à Soanierana, en périphérie d’Antananarivo, les soldats du CAPSAT ont lancé un appel clair : désobéissez

Dans une vidéo, les militaires appellent à l’unité des forces armées. « Unissons nos forces, militaires, gendarmes, policiers », lancent-ils.

Ils refusent d’être payés pour tirer sur leurs proches. « Nos amis, nos frères, nos sœurs », rappellent-ils. Les soldats dénoncent une double injustice. D’un côté, les jeunes restent sans emploi. De l’autre, la corruption et le pillage s’intensifient sous des formes multiples.

En parallèle, les forces de l’ordre répriment violemment : elles persécutent, blessent, emprisonnent et tirent sur leurs propres compatriotes.

En 2009, cette base avait déjà mené une mutinerie lors du soulèvement populaire qui avait porté au pouvoir l’actuel président.

– « N’obéissez plus aux ordres » –

Les militaires appellent à la désobéissance. Ils exhortent leurs camarades à ne plus suivre les ordres de leurs supérieurs.

« Braquez vos armes sur ceux qui vous ordonnent de tirer sur vos frères d’armes », lancent-ils. Selon eux, ces chefs ne prendront pas soin des familles des soldats tombés. Le nombre de soldats ayant répondu à cet appel n’était pas connu dans l’immédiat.

Le mouvement Gen Z exige la démission du président Rajoelina. Il a présenté une liste de revendications écrites. Parmi elles : un dialogue national démocratique et un accès universel aux services essentiels, de l’eau à l’emploi.

Le mouvement rejette toute accusation de coup d’État. Il affirme ne pas vouloir prendre le pouvoir par la force. Pourtant, il remercie le CAPSAT pour son « geste puissant et historique ». Ce soutien militaire, même symbolique, renforce les soupçons.

– L’armée appelée au calme, le pouvoir se militarise –

Le nouveau ministre des Armées, Deramasinjaka Manantsoa Rakotoarivelo, a appelé les troupes au calme lors d’une conférence de presse. « Nous appelons nos frères qui ne sont pas d’accord avec nous à privilégier le dialogue », a-t-il déclaré.

Selon l’ONU, les manifestations ont déjà fait au moins 22 morts. Plus d’une centaine de personnes ont été blessées.

Mercredi, le président Rajoelina a contesté les chiffres officiels. Il a parlé de 12 morts. Selon lui, il s’agirait uniquement de « pilleurs » et de « casseurs ».

D’abord conciliant, le président a tenté d’apaiser les tensions. Mais face à l’ampleur des manifestations, il a changé de stratégie. Il a renvoyé son gouvernement, puis nommé un militaire comme Premier ministre le 6 octobre. Ce choix marque un tournant. Depuis, seuls trois nouveaux ministres ont été désignés. Tous appartiennent aux forces de sécurité : Armées, Sécurité publique, Gendarmerie.

Ce resserrement du pouvoir autour des sphères militaires et policières traduit une volonté de contrôle. Le président durcit le ton. Il privilégie désormais la fermeté à la négociation.

Source: Agence France-Presse

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