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Paul Biya, l’éternel « sphinx » qui règne sans partage sur le Cameroun

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Trans Afrique

À 92 ans, Paul Biya l’éternel sphinx vise un huitième mandat. Président du Cameroun depuis 1982, il reste invisible pendant la campagne. Il entretient son image : secret, redouté, intraitable.

Le 1er octobre, il rentre au Cameroun après un mystérieux séjour privé en Suisse. Mardi, il tient son premier meeting de campagne à Maroua, dans l’Extrême-Nord. À 92 ans, il reste le plus vieux chef d’État en exercice au monde.

Ce déplacement électoral pourrait être le seul de sa campagne. Il choisit une région longtemps acquise à sa cause. Mais cette fois, l’enjeu est plus grand : plusieurs figures du Nord, jadis ses alliés, y briguent sa succession.

– Une campagne fantôme pour un pouvoir verrouillé –

Le 27 septembre, le président lance sa campagne. Il publie une vidéo sur les réseaux sociaux. Mais les critiques fusent : l’opposition dénonce l’usage d’images générées par intelligence artificielle. Pendant ce temps, ses adversaires sillonnent le pays.

Il diffuse chaque jour sur son profil X des tweets reprenant d’anciennes photos et citations de lui.

Depuis son arrivée au pouvoir, le deuxième président du Cameroun impose un contrôle total. Il nomme et congédie directement aux postes-clés. En parallèle, il réprime sans relâche toute forme d’opposition, qu’elle soit politique ou armée.

Longtemps influent sur la scène diplomatique, il gérait les affaires avec assurance. Mais ces dernières années, l’ONU et plusieurs capitales occidentales ont critiqué sa gouvernance, de façon inhabituelle.Paris prend ses distances. Pourtant, il reste l’un des derniers piliers de la « Françafrique ». Ce refroidissement diplomatique marque un tournant.

Depuis sa réélection contestée en 2018, marquée par des accusations de fraude, il disparaît presque de la scène publique. Il se limite à quelques discours télévisés, enregistrés et laborieux. Parfois, il apparaît à l’étranger lors de déplacements officiels. Le reste du temps, on le voit sur des images de fêtes familiales, entouré de son épouse Chantal — connue pour ses tenues flamboyantes — et de leurs trois enfants.

– Luxe et répression –

Ces dernières années, Paul Biya multiplie les séjours privés à l’étranger. Il séjourne régulièrement dans un hôtel de luxe à Genève. Officiellement, il s’y rend pour des soins ou du repos. Mais l’opposition l’accuse : selon elle, il y dilapide l’argent public avec sa cour.

En 2018, l’OCCRP publie une enquête. Le consortium estime que, sur 35 ans, ses séjours privés à l’étranger totalisent quatre ans et demi. Coût cumulé : 65 millions de dollars.

Même à distance, il contrôle de près collaborateurs, ministres et entourage, et sa succession est un sujet tabou.

Ses détracteurs l’accusent de régner dans une tour d’ivoire depuis son village natal de Mvomékaa (sud) alors que son pays affronte de multiples défis. Selon l’ONU, près de 40% de la population vit dans l’extrême pauvreté. La corruption y reste également omniprésente à divers niveaux de l’administration.

Sur le plan politique, la répression s’intensifie. Des centaines de manifestants pacifiques sont arrêtés, puis condamnés. Parmi eux : Maurice Kamto, rival malheureux à la dernière présidentielle. Cette année, le Conseil constitutionnel rejette sa candidature.

Depuis 2009, des attaques jihadistes frappent l’extrême nord. Puis, fin 2016, un nouveau front s’ouvre : des groupes indépendantistes affrontent les forces de sécurité dans l’ouest. Ce conflit sanglant éclate après la répression violente de manifestations pacifiques de la minorité anglophone. Chaque camp est accusé de crimes contre les civils.

Il verrouille le commandement militaire. Il le confie à ses proches. Ensuite, il délègue l’encadrement des troupes d’élite et sa propre sécurité à des Israéliens. Résultat : même son premier cercle tremble.

En 1986, Paul Biya lance une phrase glaçante à un journaliste vedette : « Il suffit d’un petit coup de tête, et vous n’êtes plus rien du tout. « Dès le début de son règne, il impose le ton.

– « Diviser pour régner » –

Ancien séminariste et diplômé de Sciences-Po Paris, il gravit les échelons sous Ahmadou Ahidjo. En 1975, il devient Premier ministre. Puis, en 1982, la Constitution le propulse à la présidence après la démission surprise d’Ahidjo. Depuis, il s’y maintient. Ses détracteurs évoquent un soutien discret de Paris.

En 1984, il se présente seul. Il obtient 100 % des voix. En 1988, il est réélu. Puis, après l’instauration du multipartisme en 1990, il remporte cinq autres scrutins. À chaque fois, il conserve le pouvoir.

Paul Biya « a mis en pratique l’adage +diviser pour régner+ pour rester au sommet », analyse le politologue camerounais Stéphane Akoa.

En 2018, Titus Edzoa dénonce un système brutal. Selon lui, l’homme au pouvoir manipule la violence et la terreur, selon ses humeurs et les rumeurs. Objectif : soumettre ses collaborateurs, puis l’ensemble de la population.

Arrêté en 1997, juste après sa candidature présidentielle, il a passé 17 ans en prison. Officiellement, les autorités l’ont condamné pour corruption.

Source: Agence France-Presse

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