Sous le choc des attaques contre deux écoles et une église, le pays engage une réforme sécuritaire au Nigeria. Dimanche, le président a ordonné le retrait des policiers affectés à la protection des élites pour les redéployer dans les rues, au service du quotidien. Dans le même temps, il a annoncé un recrutement massif.
Ce geste n’est pas seulement administratif : il incarne la volonté de transformer la peur en mobilisation, de rappeler que l’État, fragilisé, cherche encore à reprendre le contrôle.
Le président Bola Tinubu est sous pression. En moins d’une semaine, 350 personnes ont été enlevées, dont plus de 300 élèves et enseignants de deux écoles — l’une catholique — ainsi que des fidèles d’une église. C’est l’une des vagues de kidnappings les plus massives qu’ait connues le pays, déjà ravagé par ce fléau.
Début novembre, le président américain Donald Trump a menacé le Nigeria d’une intervention militaire. Il a accusé les autorités de « tolérer les meurtres de chrétiens » par des islamistes radicaux. Abuja a vigoureusement rejeté ces accusations.
Le président du Nigeria a ordonné le retrait des policiers affectés à la protection des personnalités. Son cabinet précise, dans un communiqué, qu’il a aussi validé le recrutement de 30 000 agents supplémentaires.
« Face aux défis sécuritaires, le président Tinubu veut renforcer la présence policière dans toutes les communautés », précise le cabinet présidentiel.
Depuis plus d’une décennie, le Nigeria vit sous le feu. Dans le nord-est, l’insurrection jihadiste mine l’État. Dans le nord-ouest et le centre, des bandes armées, appelées « bandits », imposent leur loi.
Leurs attaques se sont intensifiées, devenant plus meurtrières, plus audacieuses. Et souvent, elles se doublent d’enlèvements, de rançons exigées comme monnaie de survie. Ce double fléau incarne la fragilité d’un pays assiégé, contraint de lutter sur plusieurs fronts à la fois.
– Tinubu promet sécurité pour tous –
Le président Tinubu a martelé sa détermination : « Je ne fléchirai pas. Chaque Nigérian, dans chaque État, a droit à la sécurité. Durant mon mandat, nous mettrons cette nation en sûreté et protégerons notre peuple.»
Ces mots, prononcés alors qu’il annonçait la libération des 38 fidèles kidnappés mardi dans une église pentecôtiste de l’ouest du pays, résonnent comme une promesse de résistance.
Ils traduisent la volonté d’un État assiégé de transformer la peur en mobilisation et d’affirmer que la sécurité n’est pas un privilège mais un droit fondamental.
Le mois dernier, l’Agence de l’Union européenne pour l’asile (EUAA) a publié un constat troublant. Sur environ 371 000 policiers recensés au Nigeria, plus de 100 000 étaient mobilisés pour protéger les élites politiques et les personnalités, délaissant les tâches de proximité au service des citoyens.
Ce chiffre ne dit pas seulement la répartition des forces : il illustre une fracture profonde, celle d’un appareil sécuritaire tourné vers le pouvoir plutôt que vers la rue, et qui nourrit le sentiment d’abandon dans un pays assiégé par la violence.
L’EUAA souligne que la pénurie de policiers, aggravée par la corruption et le manque de moyens, a eu des effets dévastateurs sur la sécurité. Les réponses aux crimes sont arrivées trop tard, laissant des communautés entières exposées, sans défense.
Ce constat dépasse les chiffres. Il met en lumière un système sécuritaire défaillant, incapable de protéger son peuple. Les failles de l’État se transforment en blessures visibles dans le quotidien des citoyens.
Source: Agence France-Presse
















