Donald Trump est arrivé vendredi en Alaska, où il doit être rejoint très vite par Vladimir Poutine pour un sommet historique, qui éprouvera la promesse du président américain de mettre un terme à la guerre en Ukraine.
Alors qu’Air Force One se posait sur l’immense base militaire d’Elmendorf-Richardson, la Maison Blanche a livré une précision d’importance: les deux dirigeants ne se verront plus en tête-à-tête, comme initialement prévu, mais seront accompagnés chacun de deux conseillers.
Pour Donald Trump, il s’agira du secrétaire d’Etat Marco Rubio et de Steve Witkoff, qui joue le rôle d’émissaire spécial auprès de la Russie.
Cette nouvelle configuration changera forcément la dynamique psychologique de cette rencontre, dont l’Ukraine et les Européens redoutent qu’elle ne permette à Vladimir Poutine de manipuler son homologue américain.
Pour le président russe, cette rencontre aux confins des Etats-Unis signe un retour fracassant sur la scène diplomatique puisqu’il sera accueilli par Donald Trump en personne à sa descente d’avion.
– Enjeux d’une réunion à Anchorage –
Premier concerné mais grand absent de ce rendez-vous sur une base militaire emblématique de la Guerre froide, près d’Anchorage, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a de son côté déclaré « compter » sur Donald Trump pour mettre un terme au conflit dans son pays meurtri. Les soldats russes « continuent à tuer le jour des négociations », a-t-il déploré.
Pendant son vol à bord d’Air Force One, le président américain a mis en avant le « respect » mutuel existant entre lui et Vladimir Poutine.
Le septuagénaire s’est vanté de savoir en « cinq minutes » maximum si sa première rencontre en personne depuis 2019 avec le maître du Kremlin serait un fiasco.
Si tout se passe bien, le président américain, qui se rêve en lauréat du prix Nobel de la paix, assure que « cette rencontre va ouvrir la voie à une autre », à trois, incluant cette fois Volodymyr Zelensky.
Mais à son arrivée à Anchorage, le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov, semblait plus réservé.
« Nous ne faisons aucune prédiction », a déclaré à une télévision russe le ministre, qui portait un sweat-shirt arborant l’inscription « URSS » en russe.
– « Oeuvrer pour la paix » –
Le choix de l’Alaska est truffé de symboles.
Ce vaste territoire a été cédé par la Russie aux Etats-Unis au XIXe siècle. Il a ensuite été un avant-poste de la Guerre froide, quand les Etats-Unis et l’Union soviétique se toisaient par-delà le détroit de Bering.
Le président ukrainien et les dirigeants européens devront attendre que l’imprévisible président américain, comme il s’est engagé, les informe de la teneur de son entrevue.
Vladimir Poutine « a aujourd’hui l’occasion d’accepter un cessez-le-feu » en Ukraine, a souligné le chancelier allemand Friedrich Merz.
La réunion doit débuter vendredi vers 19H30 GMT. La première réunion sera suivie par un repas de travail, avec davantage de ministres et conseillers.
Les présidents russe et américain donneront ensuite une rarissime conférence de presse pour les journalistes du monde entier présents sur place, devant un fond bleu portant l’inscription « Pursuing Peace » (« Oeuvrer pour la paix »).
– « Donnant-donnant » –
Cette paix semble bien lointaine, tant les positions des deux belligérants paraissent pour l’heure irréconciliables.
La Russie réclame que l’Ukraine lui cède quatre régions partiellement occupées (Donetsk, Lougansk, Zaporijjia et Kherson), en plus de la Crimée annexée en 2014, et qu’elle renonce aux livraisons d’armes occidentales et à toute adhésion à l’Otan.
C’est inacceptable pour Kiev, qui veut un cessez-le-feu inconditionnel et immédiat, ainsi que des garanties de sécurité futures.
Donald Trump, qui depuis l’invasion russe de février 2022 renvoie dos à dos les deux belligérants, parle de « donnant-donnant » en matière de concessions territoriales, à l’heure où l’armée russe accélère sa progression en Ukraine, forçant les autorités ukrainiennes à évacuer des villages entiers.
Vendredi, Volodymyr Zelensky a annoncé l’envoi de renforts dans l’est de l’Ukraine pour stopper les avancées russes.
Si le président russe et le président américain ont une obsession commune, celle de ne jamais apparaître en position de faiblesse, leurs approches des rapports de force internationaux sont bien différentes.
Pour Donald Trump, ancien promoteur immobilier devenu célèbre grâce à une émission de téléréalité, tout est affaire de négociation rapide, de marchandage rondement mené, pour arriver à un « deal » forcément avantageux pour lui.
Là où Vladimir Poutine, ancien du KGB formé à la guerre psychologique, raisonne à long terme, évoquant le destin historique d’une « grande Russie » qu’il voudrait reconstituer.
« Je ne vais pas être content s’il n’y a pas de cessez-le-feu aujourd’hui », a confié Donald Trump dans l’avion. Il s’est même dit prêt à quitter abruptement la table des discussions vendredi pour marquer sa frustration.
Source : Agence France-Presse