Le Premier ministre indien Narendra Modi est arrivé samedi à Tianjin (nord) parmi une kyrielle de dirigeants venus participer à un sommet illustrant l’emprise diplomatique de la Chine, avant qu’une grandiose parade n’exhibe sa puissance militaire.
Il s’agit de la première visite en Chine de M. Modi depuis 2018. Elle illustre l’effort en cours depuis plusieurs mois pour réchauffer les rapports entre les deux pays les plus peuplés du monde, a fortiori avec les droits de douanes américains qui frappent leurs produits.
La Chine et l’Inde se sont affrontés militairement sur leur frontière en 2020 et se livrent une intense compétition régionale.
M. Modi fait partie de la vingtaine de chefs d’Etat et de gouvernement eurasiatiques attendus, avec des responsables de plusieurs organisations internationales ou régionales, au sommet de l’Organisation de coopération de Shanghai (OCS) programmé dimanche et lundi dans la mégapole portuaire.
Parmi eux, les présidents russe, iranien et turc, Vladimir Poutine, Massoud Pezeshkian et Recep Tayyip Erdogan.
– Défilé monumental à Pékin –
Certains, dont MM. Poutine et Pezeshkian, sont invités à prolonger leur séjour jusqu’à mercredi. Ils assisteront à la démonstration par leur hôte de ses capacités militaires, à la faveur d’un défilé monumental célébrant à Pékin les 80 ans de la fin de la Seconde Guerre mondiale.
Le leader nord-coréen Kim Jong Un effectuera pour l’occasion une rare sortie hors de son pays reclus, pour se tenir chez le voisin et allié chinois au côté du président Xi Jinping.
Le Premier ministre indien ne figure pas parmi les dirigeants annoncés au défilé de mercredi. Mais il doit avoir des entretiens bilatéraux avec les présidents chinois et russe.
L’abondante communication officielle en amont du défilé de mercredi l’a présenté comme une démonstration de force et une affirmation de volonté de paix, la puissance militaire chinoise garantissant la stabilité dans un monde menaçant.
Elle a aussi exalté le multilatéralisme dont l’Organisation de coopération de Shanghai serait le modèle, loin des « mentalités de la Guerre froide et des notions dépassées de confrontation géopolitique », selon les mots de l’agence officielle Chine nouvelle. Le sous-entendu visant les Américains et leurs alliés occidentaux ne fait aucun doute.
– L’OCS face aux crises mondiales –
L’OCS associe 10 Etats membres et 16 pays observateurs ou partenaires et représente presque la moitié de la population mondiale et une part importante du PIB global. Elle est volontiers présentée comme faisant contrepoids à l’Otan.
Elle tient ce qui est décrit comme son plus grand sommet depuis sa création en 2001 dans un contexte de crises multiples touchant directement ses membres: confrontation commerciale des Etats-Unis avec la Chine et l’Inde, guerre en Ukraine, querelle nucléaire iranienne…
M. Poutine est attendu dans la nuit de samedi à dimanche. De nombreux alliés de Kiev soupçonnent Pékin de soutenir Moscou contre l’Ukraine. La Chine invoque la neutralité et accuse les pays occidentaux de prolonger les hostilités en armant l’Ukraine.
Le président chinois cité par les médias officiels a décrit mardi les relations avec la Russie comme « les plus stratégiquement importantes existant entre grands pays », dans un monde « troublé et changeant ».
Le sommet « va renforcer la capacité de l’OCS à répondre aux défis et aux menaces du monde contemporain et consolider la solidarité à travers l’espace commun eurasiastique », a déclaré M. Poutine à Chine nouvelle. Lui aussi a appelé de ses voeux un « ordre mondial multipolaire plus juste ».
M. Poutine devrait s’entretenir lundi du conflit en Ukraine avec son collègue turc et du dossier nucléaire avec son collègue iranien.
Il a besoin « de tous les atouts que présente l’OCS sur la scène mondiale et il a besoin du soutien de la deuxième économie mondiale », la Chine, dit à l’AFP l’expert de l’Asie de l’est Lim Tai Wei.
« La Russie voudrait aussi rallier l’Inde à sa cause et les frictions commerciales de l’Inde avec les Etats-Unis offrent cette opportunité », ajoute-t-il.
Source : Agence France-Presse