Vendredi, la justice libanaise a ordonné la libération de Hannibal Kadhafi. Fils de l’ex-dirigeant libyen, il était détenu depuis dix ans sans jugement. En contrepartie, une caution de 11 millions de dollars est exigée. Cette décision intervient malgré les sanctions internationales qui frappent le clan Kadhafi. Son avocat conteste le montant, jugé irréaliste. En parallèle, une interdiction de voyage a été prononcée.
L’avocat français de Hannibal Kadhafi a annoncé qu’il contesterait la caution. Selon lui, son client est incapable de réunir 11 millions de dollars. Le clan Kadhafi reste sous sanctions internationales, ce qui rend tout transfert de fonds pratiquement impossible.
Les autorités libanaises exigent de Hannibal Kadhafi des informations sur la disparition de Moussa Sadr. Le chef religieux chiite a disparu en Libye en 1978. Beyrouth accuse Mouammar Kadhafi, père de l’accusé. Cette exigence conditionne la libération du fils, détenu depuis dix ans sans procès.
Hannibal, aujourd’hui âgé de 49 ans, avait deux ans à l’époque.
Le juge d’instruction chargé de l’affaire Moussa Sadr a validé la libération de Hannibal Kadhafi. La justice libanaise exige une caution de 11 millions de dollars pour libérer Hannibal Kadhafi. Son avocat dénonce une somme irréaliste, soulignant que son client est sous sanctions internationales et n’a jamais été jugé depuis son arrestation en 2015.Cette décision intervient après dix ans de détention sans jugement. Le responsable judiciaire libanais, cité par l’AFP, confirme l’accord.
– Une caution record pour Hannibal Kadhafi –
Selon ce responsable qui a requis l’anonymat, Hannibal Kadhafi est en outre frappé d’une interdiction de voyage.
« La libération sous caution est purement inadmissible dans un cas de détention arbitraire. On va contester la caution », a affirmé à l’AFP son avocat français, Laurent Bayon, relevant que son client était « sous sanctions internationales ».
« Où voulez-vous qu’il trouve 11 millions de dollars? », a-t-il demandé.
En septembre, la justice libanaise a libéré Riad Salamé, ex-gouverneur de la Banque centrale, après le versement d’une caution record de plus de 14 millions de dollars. Il est accusé de détournements de fonds. Cette somme dépasse celle exigée pour Hannibal Kadhafi, fixée à 11 millions.
Dans un communiqué, la famille de Moussa Sadr s’est dite « surprise » par la décision de la justice libanaise.
« L’arrestation ou la libération de Hannibal Kadhafi n’est pas notre objectif. Ce n’est qu’un aspect juridique secondaire », a-t-elle toutefois indiqué. « Notre principale préoccupation reste la disparition de l’imam Moussa Sadr. »
– Rapt rocambolesque –
Mouammar Kadhafi a été tué en octobre 2011, lors d’un soulèvement populaire en Libye. Trois de ses fils ont également trouvé la mort pendant la révolte. Le régime, au pouvoir depuis plus de 40 ans, s’est effondré sous la pression des insurgés et de l’intervention internationale.
Dans les années 2000, Hannibal Kadhafi a eu des démêlés judiciaires en France et en Suisse. Il a ensuite fui en Syrie pour retrouver son épouse, une mannequin libanaise. Peu après son arrivée au Liban, Hannibal Kadhafi a été enlevé dans la Békaa en décembre 2015 par un groupe armé. Ses ravisseurs l’ont ensuite livré aux services de renseignement libanais. Depuis, il est détenu sans jugement.
Il avait été attiré en territoire libanais par des hommes armés liés au fils d’un des deux compagnons de l’imam Sadr, disparu en même temps que lui. Les autorités libanaises l’avaient sorti des mains de ses ravisseurs pour le placer en détention.
Arrêté en 2015, Hannibal Kadhafi n’a jamais été jugé. Détenu à l’isolement depuis près de dix ans, il a été hospitalisé la semaine dernière pour des douleurs abdominales aiguës. Son avocat évoque un état de santé « alarmant », aggravé par les conditions de détention. Son avocat décrit un état de santé « alarmant », aggravé par dix années d’enfermement sans procès.
En août, Human Rights Watch a exigé la libération immédiate de Hannibal Kadhafi. Human Rights Watch considère que la détention de Hannibal Kadhafi repose sur des allégations non fondées. L’ONG appelle à sa libération immédiate, estimant qu’aucune preuve ne justifie son maintien en prison. Selon l’ONG, rien ne prouve qu’il détienne des informations sur la disparition de Moussa Sadr.
– L’affaire Sadr, miroir d’un Moyen-Orient fracturé –
Les autorités libanaises tiennent Mouammar Kadhafi pour responsable de la disparition de l’imam Moussa Sadr et de ses deux compagnons en 1978. L’imam Moussa Sadr a été vu pour la dernière fois en Libye, lors d’un déplacement officiel en août 1978. Depuis, aucune trace. Les autorités libanaises tiennent Mouammar Kadhafi pour responsable de sa disparition. Depuis, aucune trace.
Nabih Berri, président du Parlement libanais et successeur de l’imam Sadr à la tête du mouvement Amal, accuse les autorités libyennes de ne pas coopérer. Il dénonce leur silence dans l’enquête sur la disparition de Sadr, survenue en 1978 à Tripoli.
La semaine dernière, le ministère libyen de la Justice a affirmé avoir coopéré dans l’affaire Hannibal Kadhafi. Il indique avoir transmis un mémorandum officiel à la justice libanaise en avril, proposant un règlement. Tripoli dénonce l’absence de réponse de Beyrouth.
Le nom de Hannibal Kadhafi apparaît aussi dans l’affaire du financement libyen de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy. Nicolas Sarkozy a été condamné à cinq ans de prison pour avoir sollicité des fonds auprès du régime de Mouammar Kadhafi. Hannibal Kadhafi, détenu au Liban, est considéré comme une source possible d’informations dans ce dossier.
Au premier semestre 2021, la justice française a identifié une possible tentative de corruption visant des magistrats libanais. Objectif : obtenir la libération de Hannibal Kadhafi. « Des acteurs français ont tenté d’obtenir la libération de Hannibal Kadhafi, espérant qu’il fournirait des éléments capables de disculper Nicolas Sarkozy dans l’affaire du financement libyen. »
Ziad Takieddine est mort en septembre au Liban. L’homme d’affaires franco-libanais, protagoniste clé de l’affaire Sarkozy-Kadhafi, emporte avec lui des secrets explosifs. Il avait accusé Nicolas Sarkozy d’avoir reçu des financements de Mouammar Kadhafi. Sa disparition survient à deux jours d’un jugement attendu dans ce dossier.
Source: Agence France-Presse