Le président américain Donald Trump a dévoilé lundi un plan de paix pour Gaza qu’il a qualifié d' »historique », mais sa mise en œuvre reste très incertaine alors que le Hamas n’a pas encore réagi et qu’Israël apparaît divisé.
Que va dire le Hamas
Le Hamas n’a pas encore réagi publiquement au plan américain en 20 points, mais une source palestinienne proche du mouvement islamiste a déclaré mardi à l’AFP qu’il examinait la proposition et que les discussions pourraient prendre « plusieurs jours ».
« Le Hamas souhaite parvenir à un accord global pour mettre fin à la guerre, assurer le retrait complet d’Israël de la bande de Gaza, la levée du blocus imposé depuis 2007, et reconstruire la bande de Gaza », selon cette source.
Mais la proposition américaine est truffée de zones d’ombres, notamment sur le calendrier du retrait israélien, et le cadre du désarmement du mouvement palestinien, des détails déjà exigés par le Hamas lors des négociations passées.
« Si ce plan est une base de négociations, le Hamas pourrait y répondre favorablement mais si c’est +à prendre ou à laisser+, ça va poser problème, parce que le Hamas ne peut pas accepter un plan si imprécis », analyse Hugh Lovatt, spécialiste du Moyen-Orient au Conseil européen des relations internationales (ECFR).
« Le Hamas a déjà accepté l’idée de ne plus gouverner la bande de Gaza (à l’issue de la guerre), et l’éventualité d’un processus de démantèlement de ses armes offensives, il est donc plus ou moins disposé à accepter une grande partie de ce plan », poursuit-il.
Le Hamas a évoqué en plusieurs occasions en 2025 un démantèlement progressif de son arsenal (arrêt de la production de nouvelles roquettes, destructions des tunnels vers Israël…), mais à condition qu’il soit assorti d’un projet politique menant à la fin du conflit israélo-palestinien.
Mardi, Hossam Badran, membre du bureau politique du Hamas, a réaffirmé auprès de l’AFP « le droit (du mouvement palestinien) à résister à l’occupation », israélienne.
« Si le Hamas rejette le plan, il apparaîtra aux yeux du monde comme celui qui fait obstruction et sape la paix internationale », commente Iyad al-Qarra, un analyste palestinien de Gaza.
« Mais si le Hamas accepte le plan dans sa forme actuelle, cela reviendra à légitimer la destruction et l’élimination de la résistance », souligne-t-il.
L’ambiguïté de Benjamin Netanyahu
Le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, a apporté son soutien au plan de paix américain mais semble avoir contredit au bout de quelques heures l’une de ses dispositions clés.
La proposition américaine prévoit un retrait progressif d’Israël du territoire palestinien, mais le Premier ministre a déclaré mardi dans une vidéo sur ses réseaux sociaux que l’armée « resterait dans la majeure partie de la bande de Gaza ».
« Netanyahu tient un double discours », note Gayil Talshir, professeure de sciences politiques à l’Université hébraïque de Jérusalem.
« Le premier pour le monde entier, le second à la base électorale de la droite en Israël », affirme-t-elle à l’AFP.
Dès l’annonce du plan faite par Donald Trump lundi à la Maison Blanche en présence de M. Netanyahu, le Premier ministre israélien a envisagé l’échec de la démarche américaine: « si le Hamas rejette votre plan, Monsieur le Président, ou s’il l’accepte en apparence mais fait ensuite tout pour le contrecarrer, alors Israël achèvera le travail par ses propres moyens », a-t-il menacé.
Selon Gayil Talshir, Benjamin Netanyahu espère probablement un rejet du plan par le Hamas, ou un « oui mais » avec des conditions inacceptables pour Israël, pour le rejeter à son tour.
Des familles d’otages détenus à Gaza et une partie de l’opposition accusent depuis longtemps le Premier ministre de saboter les efforts diplomatiques en vue d’un cessez-le-feu et de prolonger la guerre pour servir ses propres intérêts politiques.
L’extrême droite israélienne
Le gouvernement Netanyahu, l’un des plus à droite de l’histoire d’Israël, compte des partenaires d’extrême droite qui refusent toute fin de la guerre tant que le Hamas n’aura pas été éliminé. Et rejettent la perspective d’un futur Etat palestinien, envisagé par le plan de paix américain.
Mardi, le ministre des Finances d’extrême droite Bezalel Smotrich a qualifié le plan d' »échec diplomatique. »
Yossi Dagan, président du conseil qui gère les colonies dans le nord de la Cisjordanie occupée, a également taclé le plan Trump en rappelant que la création d’un Etat palestinien était une « ligne rouge. »
« Si le Hamas dit oui, Netanyahu n’aura plus de gouvernement », prédit Mme Talshir. « Beaucoup de colons pensent déjà qu’il les a trahis. »
Dans sa vidéo de mardi, M. Netanyahu a pourtant redit son opposition de longue date à un Etat palestinien, allant jusqu’à affirmer que cela ne figurait pas dans le plan de Trump.
© Agence France-Presse