Une épaisse fumée s’élève samedi de dizaines de maisons et de commerces dans un quartier de la ville de Soueida, dans le sud de la Syrie, où les combattants tribaux sont accusés par des témoins de tout brûler sur leur passage, certains menaçant de tuer les druzes jusque « dans leurs maisons ».
Malgré l’annonce par la présidence syrienne d’un cessez-le-feu « immédiat », les affrontements se poursuivent. Les membres de tribus et bédouins armés, alliés aux autorités, ont pu forcer la résistance des combattants druzes et pénétrer dans la ville par l’ouest.
« En avant, les tribus! », encourage l’un des combattants tribaux, Abou Jassem, qui menace de tuer « les gens dans leurs maisons ».
Les combattants tribaux ont afflué de plusieurs régions de la Syrie pour prêter main forte aux bédouins, engagés depuis le 13 juillet dans des combats avec les groupes druzes. Les violences intercommunautaires ont fait 940 morts selon une ONG.
Un correspondant de l’AFP a vu des dizaines de maisons et de voitures brûlées et des hommes armés mettre le feu à des magasins après les avoir pillés.
Certains combattants, le visage masqué, tirent à l’arme automatique en pleine rue. D’autres circulent à bord de camionnettes ou des scooters.
L’un des combattants a le front ceint d’un bandeau noir portant la profession de foi de l’islam. Un autre brandit des ciseaux, utilisés pour taillader les moustaches des vieux druzes, insulte suprême pour ce peuple de fiers guerriers.
Les druzes, une communauté ésotérique issue d’une branche de l’islam, est considérée avec méfiance par le courant islamiste sunnite dont sont issues les nouvelles autorités dirigées par Ahmad al-Chareh.
– « Il ne nous reste plus rien » –
Dans la ville qui compte quelque 150.000 habitants, les habitants sont terrés chez eux, privés d’eau et d’électricité alors que les communications sont coupées.
A l’hôpital gouvernemental de Soueida, un photographe de l’AFP a indiqué que les responsables allaient enterrer momentanément dans une fosse commune les corps qui s’amoncellent, la morgue étant saturée.
Un médecin avait indiqué samedi à l’AFP que l’hôpital, qui fonctionne à peine, avait accueilli plus de 400 corps, dont des femmes et des enfants, depuis le début des combats.
Sur les réseaux sociaux, des vidéos mises en ligne ont documenté ces derniers jours des exécutions sommaires de civils.
« Il ne nous reste plus rien. La plupart des gens que nous connaissons sont morts, nos proches et nos amis », a affirmé à l’AFP un habitant ayant fui la ville, qui a requis l’anonymat.
– Situation critique à Soueida –
Près de 87.000 personnes ont été contraintes de quitter leur domicile dans la province de Soueida, selon l’Organisation internationale pour les migrations (OIM).
Les autorités syriennes ont annoncé qu’elles allaient déployer les forces de sécurité intérieure à Soueida « pour mettre un terme au chaos », mais elles n’ont pas encore pénétré dans la ville.
Samedi après-midi, un correspondant de l’AFP a vu des combattants tribaux évacuer le centre de Soueida en retirant des corps des leurs.
Près d’un village au nord de la ville, un correspondant de l’AFP a vu des troupes gouvernementales se déployer à un poste de contrôle, tentant en vain d’empêcher des membres armés des tribus d’avancer vers la région.
Les forces de sécurité se déploient « pour protéger les biens publics et privés et garantir la sécurité des civils », a déclaré à l’AFP le porte-parole du ministère de l’Intérieur, Noureddine al-Baba, depuis le nord de la province de Soueida.
Il a ajouté que les forces gouvernementales devaient « superviser le retrait des tribus qui étaient en conflit avec des groupes hors-la-loi », en référence aux groupes armés druzes.
Source : Agence France-Presse