Les classes viennent à peine de commencer, voilà que les rapports sortent sur la rentrée scolaire de 2024 dans le département du Noun. Les chiffres parlent de 60 grossesses au lycée de Njimon à Foumban.
L’alerte est contenue dans une vidéo devenue virale dans les réseaux sociaux. Les informations qui s’y trouvent font état de 60 cas de grossesse pour l’année 2024. L’homme qui présente la situation est le président du Conseil national de la jeunesse dudit département.
Et certaines sources non officielles confirment les dires. « J’ai personnellement vu deux cas. Les filles des voisins. L’une ne classe de 3ème et l’autre en 4ème. Elles sont aujourd’hui des filles mères ».
Alors, « aucune d’entre elles ne va plus en classe. Et les garçons ont fui pour certains. D’autres ont aussi abandonné les bancs pour faire la moto. Voilà donc des vies compromises. Et la scolarité bafouée. Les parents sont sans voix », va relater Ahmed Mouliom depuis Foumban.
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Grossesses précoces et non désirées
Alors. Cette affaire vient relancer le débat sur les causes d’abandon des études par les filles, refait surface. Et de surcroit ce problème devenu récurrent dans les lycées et collèges au Cameroun. On parle donc des grossesses précoces et non désirées. Comme facteur majeur d’abandon scolaire chez les adolescentes.
Pour Arsène Panda, « Les grossesses précoces et non désirées constituent un problème de santé publique majeur. Elles touchent particulièrement les jeunes filles dans les pays à faibles ou moyens revenus. Et sont associés à des risques accumulés de mortalité et morbidité maternelle, d’échec scolaire, d’isolement social. Et à une perpétuation des cycles de pauvreté », va expliquer le sociologue.
Toutefois, « les causes incluent la pauvreté, les inégalités de genre, le manque d’accès à l’éducation sexuelle et contraceptive. Et sont souvent exacerbées par le mariage des enfants. Pour y faire face, il faut développer des stratégies de prévention axées sur l’éducation sexuelle. L’accès aux services de santé reproductive. Et des mesures pour lutter contre les mariages d’enfants », va-t-il proposer.
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Responsabilisation des garçons
Alors pour certains analystes, les autorités camerounaises sont plutôt dans les stratégies de réparation. « La lutte contre les grossesses scolaires reste centrée sur la gestion a posteriori. Donc le maintien des jeunes mères à l’école, alors que les actions préventives peinent à s’imposer » .
Seulement, « la sensibilisation des familles, l’accès effectif à la planification familiale, la promotion de l’éducation sexuelle adaptée aux contextes locaux. Et la responsabilisation des garçons restent encore insuffisants », va déclarer Ernest Edubé, enseignant.
Ainsi donc, il s’agit de voire doublement la situation. Aussi, pour les éducateurs, il est question de garantir le droit à l’éducation des adolescentes déjà affectées. Et de réduire les risques en amont pour éviter que les grossesses précoces ne continuent d’alimenter le décrochage scolaire. Et les inégalités de genre.
21 millions de filles âgées de 15 à 19 ans
En principe, « l’efficacité des politiques mises en place sera mesurée à la capacité des pouvoirs publics. A passer de la réaction à la véritable anticipation », va laisser entendre Benjamin Moulobi. Qui déplore l’absence des statistiques au Cameroun.
Pourtant, « 21 millions de filles âgées de 15 à 19 ans tombent enceintes. Et près de 12 millions donnent naissance. Ces grossesses sont souvent plus fréquentes chez les jeunes filles issues de milieux modestes ou peu instruites », révèle l’Oms.