« Arrêtez le massacre, protégez les minorités ! Jolani terroriste ! Jolani assassin ! Protégez Soueida », chante Eva Radwan, utilisant le nom de guerre d’Ahmad al-Chareh, l’ex-jihadiste devenu président. A Paris et à Londres, une poignée de druzes ont manifesté samedi pour dénoncer les massacres en Syrie.
Devant la tour Eiffel, avec une vingtaine de manifestants, cette doctorante en droit de 41 ans porte des photos de son cousin de 34 ans et des deux fils de sa cousine, âgés de 13 et 16 ans, qui ont été tués.
« C’est comme un nettoyage ethnique. Ils veulent la ville (de Soueida, ndlr) sans ses habitants. Ils essayent de tuer autant qu’ils peuvent », a dénoncé William Salha à Londres, où ils étaient quelques dizaines à manifester.
Des combats ont éclaté la semaine dernière entre groupes bédouins sunnites et combattants de la minorité druze. Et les forces gouvernementales syriennes ont été accusées d’avoir participé avec les bédouins à des exactions contre les druzes.
Depuis le 13 juillet, les violences ont fait 940 morts dans la province, dont 588 druzes (326 combattants et 262 civils), 312 membres des forces gouvernementales et 21 Bédouins sunnites, d’après l’ONG locale OSDH.
A Paris, Aïda Haladi, jeune retraitée, est venue avec le portrait de son frère. « C’était un homme honnête. Jamais, jamais il n’a essayé de blesser quelqu’un. Il est sorti de sa maison pour chercher ses médicaments » quand il a été tué.
« Il avait 52 ans. Il travaillait. Il vivait en paix. Il avait un garçon et une fille. Je ne suis pas énervée, je suis en colère. C’est la rage », dit-elle à l’AFP.
– « Mouvement barbare » –
« Elle est où la France, là ? Elle est où ? », demande-t-elle, en voulant à Emmanuel Macron qui a accueilli en mai à Paris le président syrien Ahmad al-Chareh, en pleine tentative de normalisation des relations entre son gouvernement islamiste et l’Occident.
Même colère à Londres de Maan Radwan – luttant contre ses larmes à l’évocation de ses proches tués – contre le ministre des Affaires étrangères David Lammy qui s’est rendu en Syrie en juillet et y a rencontré le président.
Venu avec sa mère, un adolescent du sud de Londres a déclaré que plusieurs membres de la famille de son père avaient été abattus: « Les groupes armés sont venus à eux, ils ont essayé de résister et ils les ont abattus ».
A Paris et Londres, les manifestants demandent un couloir humanitaire, vers la Jordanie car la route de Damas n’est pas sûre selon eux.
« Tirs, décapitations, viols, meurtres d’enfants, incendies de magasins et de maisons… C’est un mouvement barbare qui se poursuit à Soueida », a dénoncé Emad al-Eismy, l’organisateur de la manifestation londonienne, devant le siège de la BBC.
Dans cette ville du Sud syrien, un correspondant de l’AFP a vu samedi des hommes armés mettre le feu à des magasins après les avoir pillés.
« Nous sommes venus ici et nous allons les massacrer tous dans leurs maisons », a lancé l’un des combattants tribaux se faisant appeler Abou Jassem, faisant référence aux druzes. Un autre brandissait des ciseaux, utilisés pour taillader les moustaches des vieux druzes, insulte suprême pour ce peuple.
Source : Agence France-Presse
