L’hommage à Raila Odinga a viré au drame. Jeudi, à Nairobi, les forces de sécurité ont ouvert le feu sur des milliers de personnes venues saluer l’opposant historique, décédé la veille. Les tirs, survenus dans le stade Kasarani selon une ONG, ont provoqué un mouvement de panique. Bilan : trois morts, évacuation massive, chaos total.
« VOCAL Africa confirme que trois corps (venus du stade) de Kasarani ont été reçus ce soir à la morgue de la ville. Nous suivons de près si d’autres corps ont pu être emmenés dans d’autres sites », a posté le groupe sur X.
Panique totale. Jeudi, à Nairobi, les forces de sécurité ont tiré. Objectif : disperser la foule venue saluer Raila Odinga. Résultat : chaos. Des dizaines de milliers de personnes ont fui le stade Kasarani en quelques minutes. L’hommage s’est mué en débâcle.
Sur la pelouse, un homme gît visiblement grièvement blessé à la tête, selon une photo prise par un photographe de l’AFP. Des journalistes de l’AFP ont vu deux autres personnes blessées.
Le chaos a failli virer au carnage. À Nairobi, les forces de sécurité ont tiré. La foule, trop nombreuse, tentait de forcer l’accès à la section VIP du stade Kasarani. C’est là que reposait Raila Odinga. Dépassés, les agents ont ouvert le feu. Le bilan : trois morts. Mais il aurait pu être bien pire.
– Hommage national sous tension –
Scènes de chaos. L’AFPTV montre une foule couchée au sol, puis fuyant dans tous les sens. Des dizaines de coups de feu retentissent. Dans les tribunes, les forces de sécurité frappent à coups de bâton de jeunes hommes. L’hommage vire à la violence.
Jeudi après-midi, des dizaines de milliers de Kényans ont envahi le stade Kasarani. Objectif : saluer Raila Odinga, figure politique majeure, mort à 80 ans en Inde. Cinq fois candidat à la présidence, il incarnait l’opposition. En 2022 encore, il avait tenté. Cette fois, c’est le pays qui lui rendait hommage.
La mort de ce combattant pour la démocratie, qui a passé huit ans en détention sous le régime autocratique d’Arap Moi, est un séisme pour les Kényans, tout particulièrement pour les Luos, qui voyaient en lui une sorte de figure paternelle vénérée. Elle laisse aussi un grand vide dans l’opposition kenyane.
Dès l’aube, la foule s’est mobilisée. Des milliers de Kényans ont accompagné la dépouille de Raila Odinga, surnommé “Baba”. Le dispositif sécuritaire, mal calibré, a vite été débordé. Résultat : confusion, tension, débordements.
Après l’arrivée du corps vers 09H30 (06H30 GMT), l’autorité de l’aviation civile kényane (KCAA) avait dû suspendre temporairement les opérations de l’aéroport Jomo Kenyatta pour « rétablir l’ordre et assurer la sécurité » . Des personnes en deuil avaient accédé à des zones réglementées.
– Foule considérable –
Le cercueil de Raila Odinga, recouvert du drapeau kenyan, devait rejoindre le Parlement. Mais la foule, dense, a contraint les autorités à changer l’itinéraire. Le cortège a été redirigé vers le stade Kasarani. Mais les milliers de personnes entourant le cortège avaient forcé les autorités à le rediriger vers le stade de Kasarani, ce qui avait créé d’importantes difficultés de circulation.
Début d’après-midi. Les télévisions kényanes diffusent des images claires : la foule bloque tout. Les grands axes vers le stade Kasarani sont paralysés. La circulation s’effondre. L’hommage à Raila Odinga devient un raz-de-marée populaire.
La foule a envahi le stade. Des branchages en main, les endeuillés ont respecté la tradition funéraire luo. Puis, peu avant 15 h 30, l’enceinte s’est vidée. Silence après la ferveur.
Martha Karua s’indigne. Sur X, l’ancienne ministre et candidate à la présidentielle dénonce : « Pourquoi la police tire-t-elle sur des gens en deuil ?» Gaz lacrymogènes, balles : la répression choque. L’émotion se mêle à la colère.
La police kényane est sous pression. Sa réputation est entachée par des accusations de brutalité. Boniface Mwangi, militant des droits humains, dénonce sur X : gestion chaotique, consignes absentes. Le constat est clair : l’État a failli.
Selon lui, malgré leur formation, les agents auraient pu agir autrement. Un candidat à la présidentielle de 2027 a renchéri : « La police kényane tire vite, et réfléchit ensuite. »
– Deuil national –
Le président William Ruto a décrété sept jours de deuil national pour Raila Odinga.
Jeudi après-midi, il s’est incliné. Dans un couloir du stade Kasarani, face à la dépouille de son ancien rival. En 2022, Raila Odinga l’accusait de fraude. Puis, alliance. Ce jour-là, silence et gestes lourds de sens.
Après le président, Ida Odinga s’est avancée. Elle s’est recueillie quelques instants. Son mari reposait dans un cercueil ouvert. Le haut du corps était couvert d’un tissu orange, couleur de son parti. Un large chapeau emblématique reposait sur lui. Silence. Poids du symbole.
Après le chaos, le retour. Des milliers de personnes ont été autorisées à revenir dans le stade. Objectif : saluer une dernière fois Raila Odinga. Le recueillement a repris. L’émotion, intacte.
Les autorités kenyanes ont installé des espaces de deuil publics à Nairobi. Elles préparent une cérémonie nationale prévue vendredi, jour férié décrété en hommage à Raila Odinga.
La dépouille doit ensuite être transférée dans l’ouest du Kenya, où M. Odinga est né, et où il bénéficiait d’un soutien populaire immense.
À Bondo, la foule s’est rassemblée. C’est là, dans son fief ancestral, que Raila Odinga sera enterré dimanche. Citizen TV a montré des images claires : émotion, ferveur, attente. Le pays entier accompagne “Baba”.
Source: Agence France-Presse