Jean Pierre Bekolo évalue à sa manière, la gouvernance. Déboussolé, désorienté et courroucé, le réalisateur déshabille le régime en place.
« Que la France vienne reprendre son monstre sans visage ! ». Ces propos illustrent à suffire la colère de Jean Pierre Bekolo. Le réalisateur qui en a après le régime crache du venin. Il se demande comment un pays comme le nôtre en est-il arrivé là ?
« Un président de 92 ans, membre de tous les gouvernements depuis 1962. Soit deux ans après l’indépendance. Annonce sa candidature à un nouveau mandat de 7 ans, par un tweet. Un homme qui ne parle plus, ne marche plus, n’existe presque plus. Mais reste au sommet d’un pays tétanisé, paralysé, le Cameroun », constate le réalisateur.
Monstre colonial français
De son point de vue, Paul Biya, c’est le dernier monstre colonial français encore debout. « Un monstre sans visage. Un spectre. Un golem façonné de main d’homme : celle de Pierre Messmer, alors gouverneur militaire, puis tout puissant Premier ministre du général de Gaulle. C’est lui qui choisit Ahidjo contre Mbida. C’est lui qui fait assassiner Ruben Um Nyobè », affirme Jean Pierre Bekolo.
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Pour lui, le Cameroun est l’unique pays d’Afrique noire à avoir pris les armes contre la France. « Il fallait le faire plier. On parle de 500 000 morts, du napalm, de villages rayés de la carte, d’une élite exterminée. Et depuis 43 ans, Biya a continué ce travail», ressasse-t-il.
Spectacle nègre en mondovision
Il regrette avoir cru vivre en démocratie au Cameroun avec l’avènement du Renouveau. « Nous avons cru avoir un État, une souveraineté, une voix. Mais tout n’était qu’un décor. Une mise en scène. Une parodie. La façade s’est effondrée. Même la politique n’est plus que caricature ».
« Un président-fantôme, des opposants-figurants, un peuple hypnotisé par le bruit, les tweets, les débats juridiques sur un droit colonial réchauffé. Le droit français des tropiques, disait Maurice Duverger en riant », enrage-t-il.
Le plus cruel, énumère ce dernier, ce n’est même plus la domination. C’est d’être obligé d’assister à ce spectacle nègre en mondovision .C’est aussi et surtout dit-il, « le fait que nous soyons devenus les gardiens du théâtre de notre propre oppression. Des marionnettes d’une démocratie exigée à la Baule en 90 par Mitterand. Que nous parlions de démocratie dans une langue qui n’est pas la nôtre. Que nous croyions penser alors que nous récitons ».
Au regard de tout cela, Jean Pierre Bekolo demande à la France de reprendre son monstre. « Celui que vous avez placé, entretenu, maintenu. Celui qui nous tient captifs dans l’écho de votre défaite mal digérée ».