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Soldats nord-coréens en Russie: questions sur l’efficacité d’un déploiement

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Trans Afrique

La présence de soldats nord-coréens aux côtés de la Russie contre l’Ukraine pose de multiples questions d’ordre tactique et militaire, jusqu’à faire douter les analystes de son efficacité et de ses objectifs réels.

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a affirmé jeudi que des soldats nord-coréens avaient « pris part aux hostilités » et subi des « pertes ». Vendredi, le Kremlin a éludé la question.

Jamais la Corée du Nord n’avait envoyé de troupes au combat à l’extérieur, notamment de peur qu’elles fassent défection ou entreprennent de dérangeantes comparaisons entre les armées étrangères et la leur.

« Le régime s’inquiète que ses soldats puissent adopter des idées +incorrectes+ », écrit Fyodor Tertitsky, de l‘université Kookmin de Séoul. Au delà, leur participation dans le conflit pose de multiples questions.

– Quelles unités ? –

Citant le renseignement américain, le chef de la diplomatie Antony Blinken avait déjà évoqué un déploiement nord-coréen dans la région russe de Koursk, attaquée par l’Ukraine en août.

Ils sont, selon lui, équipés d’uniformes russes et formés à l’artillerie, aux drones, aux opérations d’infanterie y compris le nettoyage des tranchées, montrant que Moscou « a bien l’intention d’utiliser ces forces dans des opérations de première ligne ».

Jusqu’à « 3.000 » soldats nord-coréens en Russie, selon Washington

Chair à canon ou forces spéciales? Les analystes sud-coréens privilégient la seconde option. « Si les pertes sont indissociables de la guerre, quel serait l’intérêt d’envoyer des troupes incompétentes (…) pour les former ? », explique à l’AFP Yang Moo-jin, président de l’Université des études sur la Corée du Nord à Séoul.

Pyongyang « doit exposer l’efficacité et les capacités opérationnelles de ses soldats pour maximiser les résultats de son déploiement », abonde Lim Eul-chul, de l’Université de Kyungnam, à Changwon (sud).

– Volume limité –

Les chiffres sont invérifiables mais les Occidentaux évoquent autour de 10.000 soldats nord-coréens déployés, 11.000 selon Kiev. Soit environ dix jours de combat, selon les estimations des pertes russes.

« Si la Russie a des problèmes de main d’oeuvre, il faudra bien plus de soldats nord-coréens pour les résoudre », assure ainsi le général australien en retraite Mick Ryan.

D’autres objectent que ce volume ne sera pas négligeable si les soldats restent dans la région de Koursk.

Les forces spéciales nord-coréennes peuvent « endurer des conditions difficiles, même quand la nourriture et d’autres ressources manquent », pointe Lim. Elles sont « résilientes mentalement » et « rigoureusement entraînées ».

– Le barrage linguistique –

Peut-on faire la guerre avec des traducteurs ? « Ils peuvent être utiles » mais le gap de communication « peut poser, et posera, un problème pendant les combats », assure Mick Ryan.

Les questions organisationnelles sont innombrables: les Nord-coréens vont-ils déployer soldats et commandement? Seront-ils autonomes ou intégrés aux unités russes? Pour quelles tâches?

« Le renseignement ukrainien a affirmé que les Nord-Coréens étaient arrivés en Russie avec 500 officiers et trois généraux », fait valoir Ivan Klyszcz, du Centre international pour la défense et la sécurité (ICDS) en Estonie.

« Cela pourrait faciliter la communication si les généraux nord-coréens et russes arrivent à travailler ensemble, mais il y a trop d’inconnues à ce stade pour être affirmatif ».

– Expérience limitée –

Les forces spéciales de Pyongyang sont d’abord formées pour prévenir un coup d’Etat, avec des « commissaires politiques (qui) signent chaque décision militaire », écrit Fyodor Tertitsky.

« La question demeure de savoir si cet encombrant système sera modifié pour les besoins de la guerre en Ukraine », ce qui serait « impossible sans l’accord personnel de Kim Jong Un ».

Soldats en Russie, tir de missile: la Corée du Nord fait monter les tensions

Les troupes nord-coréennes ne se sont par ailleurs pas battues depuis 1953 et devraient souffrir face à des Ukrainiens en guerre depuis deux ans et demi.

L’armée de Kim s’appuie sur la masse, modèle de la guerre du XXe siècle, avec 30% de la population engagée – active, réserve, paramilitaires – indique Ivan Klyszcz à l’AFP.

Mais « même si leur régime communiste demeure une sorte d’avatar dépassé du modèle soviétique », cette prééminence de la masse « est étrangement redevenue pertinente au XXIe siècle ».

– Le renseignement aux abois –

Ce déploiement sera épié et analysé tous azimuts.

« Partager les leçons sur le combat moderne, en particulier l’usage intégré des drones, des missiles balistiques et de croisière, sera d’un grand intérêt pour la Corée du Nord », assure Mick Ryan, citant aussi la guerre électronique et « les connaissances glanées sur les armes occidentales récupérées en Ukraine ».

Mais l’inverse est vrai aussi: en pleines tensions sur la péninsule, « Séoul semble vouloir saisir l’opportunité d’obtenir du renseignement sur son ennemi », fait valoir Fyodor Tertitsky.

D’autant que la fermeture de la frontière datant de la pandémie de covid-19 a considérablement réduit l’arrivée au sud de réfugiés du nord, qui constituent « la principale source d’information » de Séoul sur son voisin.

Source: Agence France-Presse

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