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Présidentielle au Cameroun: le gouvernement admet des morts, l’UE et l’UA déplorent la violence de la répression

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Trans Afrique

Le gouvernement camerounais admet des morts lors des manifestations post-électorales. Mardi, l’Union européenne et l’Union africaine ont dénoncé la répression. En toile de fond : la réélection contestée de Paul Biya, 92 ans, pour un huitième mandat. La tension monte. Les critiques s’intensifient.

Mardi, face aux micros, Paul Atanga Nji a lâché une phrase lourde de silence : « Des manifestations illégales se sont soldées par des pertes en vies humaines et la destruction de biens publics et privés. » Mais ni date, ni bilan. Juste une reconnaissance sans contours, comme un aveu suspendu. Derrière les mots, l’ombre des corps et des ruines. Le pouvoir parle, mais ne raconte pas. Chaque omission devient un symbole. Chaque flou, une stratégie.

Mardi, le calme était précaire. La veille, des manifestations sporadiques ont secoué plusieurs villes après l’annonce de la réélection de Paul Biya, au pouvoir depuis 43 ans. Son principal rival, Issa Tchiroma Bakary, conteste vivement cette victoire.

Le ministre Atanga Nji a déploré des destructions massives : édifices publics, commerces et biens privés incendiés, saccagés, pillés. Les violences ont touché Dschang, Ngon, Guider, Garoua. Le pays vacille. L’ampleur reste floue.

Douala, capitale économique, n’a pas échappé à la tourmente : pillages, vandalisme, chaos. Le ministre, visage fermé, désigne un coupable — Issa Tchiroma. Il fustige son « irresponsabilité » et annonce des poursuites. Le pouvoir trace ses lignes. L’opposant devient cible. Dans les rues, les ruines parlent. Dans les discours, la justice devient une arme. Le conflit glisse du politique au pénal. Et chaque mot prononcé scelle un affrontement plus profond.

– « Recours excessif à la violence » –

L’Union européenne presse Yaoundé : identifier les responsables, agir avec transparence, rendre justice. Objectif : freiner la violence et les violations des droits humains. Le porte-parole Anouar El Anouni hausse le ton.

Le président de la Commission de l’UA, Mahamoud Ali Youssouf, a appelé au dialogue. Il a félicité Paul Biya, mais s’est dit vivement préoccupé par les violences, la répression et les arrestations de manifestants et d’acteurs politiques. Le ton est diplomatique, mais l’alerte est claire.

La veille, le Haut-Commissariat de l’ONU aux droits de l’homme avait demandé des enquêtes après ces violences. « Nous appelons à la retenue, à l’ouverture d’enquêtes et à la fin des violences », avait indiqué le Haut-Commissariat, sur le réseau social X.

Illaria Allegrozzi, analyste sénior d’Afrique pour Human Rights Watch, a également dénoncé « l’usage excessif de la force par les forces de sécurité ». « Les forces de l’ordre devraient protéger les gens et non alimenter la violence. », a-t-elle ajouté dans un communiqué de presse.

Paul Biya, 92 ans, a été déclaré vainqueur avec 53,66 % des voix. Son rival, Issa Tchiroma, crédité de 35,19 %, dénonce une « mascarade » électorale. Le doute s’installe. La contestation s’amplifie.

La victoire de M. Biya, réélu jusque-là avec plus de 70% des voix depuis plus de deux décennies, était attendue, tant son emprise sur les institutions semble ferme.

Mais l’engouement autour de la candidature d’Issa Tchiroma Bakary, notamment chez les jeunes avides de changements, a surpris les observateurs.

– « Légitimité fragilisée » –

Pour Murithi Mutiga, responsable du programme Afrique à l’International Crisis Group (ICG), « la légitimité du mandat de Paul Biya est fragilisée, car une grande partie de ses propres citoyens ne croit pas en sa victoire électorale ».

Il a, en conséquence, appelé le président Biya « à engager de toute urgence une médiation nationale afin d’éviter une escalade supplémentaire ».

Des manifestations sporadiques et limitées – quelques centaines de jeunes au maximum à ce stade – ont eu lieu ces derniers jours dans plusieurs villes, notamment la capitale économique Douala, où quatre personnes sont mortes dimanche lors d’un rassemblement, selon le gouvernorat régional.

La tension est également vive dans le fief de M. Tchiroma à Garoua (nord), où il a dit lundi se trouver et être protégé par « mille » personnes devant chez lui, en affirmant que des « snipers » ont tiré sur ses partisans, et en déplorant « deux morts » après l’annonce des résultats.

Mardi matin, quelques boutiques de Garoua ont rouvert timidement, et les conducteurs de mototaxis ont repris progressivement leur service, ont constaté des journalistes de l’AFP.

Mais la peur persiste, la population reste sur le qui-vive et les écoles sont fermées, les parents préférant garder leurs enfants à la maison par prudence.

– « Je reste chez moi » –

« Je reste chez moi toute la semaine. Si la violence reprend, on ne pourra pas s’enfuir à temps », confie un enseignant sous couvert d’anonymat. Boubakary, 26 ans, résume l’atmosphère: « La violence peut exploser à tout moment. On espère que ça va se calmer. »

Devant le domicile d’Issa Tchiroma, environ 150 jeunes restaient rassemblés mardi, sous l’œil de policiers déployés en nombre, selon un photographe de l’AFP.

À Douala, après des manifestations réprimées par les forces de l’ordre lundi, les réseaux sociaux évoquaient deux morts lors des violences post-électorales, sans confirmation officielle.

Le gouverneur de la région du littoral Samuel Dieudonné Ivaha Diboua a déclaré à la télévision nationale avoir effectué « 200 arrestations » principalement « des vandales, des drogués, des personnes désœuvrées … et non des militants d’un parti ».

La ville de Douala était hautement sécurisée par l’armée et les forces de l’ordre mardi selon des journalistes de l’AFP.

Source: Agence France-Presse

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