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Maurice Kamto s’exprime… et se tait : une épreuve politique pour ses militants

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Trans Afrique

Maurice Kamto sans consigne de vote : une prise de parole qui interroge. Alors que le climat politique camerounais s’intensifie, le professeur Kamto s’est exprimé ce 26 septembre. Son intervention, très attendue par ses militants, n’a pourtant apporté aucune consigne électorale. Un choix qui ne relève ni de l’oubli ni de la faiblesse, mais d’une stratégie assumée. Posture politique, épreuve de maturité ou désengagement calculé ? Entre le silence du maître et la précipitation des disciples, une séquence révélatrice se joue — et mérite d’être recadrée.

– Quand le maître se tait, l’élève se révèle –

Dans les cercles spirituels, on dit : « Quand l’élève est prêt, le maître apparaît. » Mais que se passe-t-il lorsque l’élève ne l’est pas ? Le maître se retire. Il observe. Il laisse le disciple face à lui-même, à ses émotions, à ses contradictions.

Ce silence n’est pas un abandon. C’est une épreuve. Une invitation à grandir.

Le militant qui demande s’il peut porter les couleurs d’un autre parti n’est pas en faute. Il est simplement en quête. Mais cette quête ne peut être guidée par des slogans ou des consignes. Elle exige une maturation politique, une capacité à lire les enjeux, à comprendre les rapports de force, à discerner l’essentiel du spectacle.

C’est dans ce contexte qu’un critique, avec une formule aussi imagée que percutante, a comparé la posture de Maurice Kamto à celle d’un spectateur sortant du cinéma ABBIA à Yaoundé, après avoir visionné un vieux film chinois des années 70. Interrogé sur ses impressions, il répondrait : « Je ne suis ni pour l’acteur, ni pour le chef bandit. »

Cette métaphore, loin d’être anodine, situe Kamto dans une posture de spectateur lucide face à un scénario politique qu’il juge bancal. Il ne se dérobe pas : il refuse simplement de jouer dans une pièce dont il conteste la mise en scène. Il sort de la salle, perplexe, et laisse chacun libre de son interprétation. Ce retrait n’est pas une fuite, mais une manière de dire : le film ne mérite pas mon rôle, et vous devez apprendre à lire entre les scènes.

Cette précipitation révèle une faille : l’absence de discipline stratégique, la tentation de l’émotion, et une méconnaissance du rôle central que joue le MRC dans l’opposition camerounaise.

– Le MRC, pilier de l’opposition –

Le MRC n’est pas un parti de circonstance. Il s’est construit méthodiquement, avec rigueur, sur plusieurs années. Il est aujourd’hui le seul parti d’opposition disposant d’une réelle implantation nationale. Toute coalition sincère devrait se structurer autour de lui — et non l’inverse.

– Sans transparence, pas de démocratie – 

Il ne peut y avoir démocratie sans transparence dans les urnes. Quand le pouvoir obscurcit le vote, verrouille les résultats avant même le scrutin, détourne les institutions censées garantir l’équité… Alors le peuple agit. Il descend dans la rue, parce que c’est le dernier espace où la parole peut encore résonner.

Ce n’est pas un appel à la violence. C’est un constat historique : lorsque les urnes mentent, seule la mobilisation populaire peut rétablir la vérité. La rue devient alors le dernier espace de légitimité, le lieu où s’exprime ce que les institutions refusent d’entendre.

Le silence du professeur Kamto, dans ce contexte, prend une autre dimension. Le message dépasse les cercles militants. C’est à l’histoire qu’il est désormais adressé. Une phrase suffit : “Je ne joue pas dans une pièce truquée.” Une posture, une rupture, un refus de se prêter au simulacre. Et il laisse à chacun le soin de décider s’il veut rester spectateur… ou devenir acteur.

Demander au MRC de suivre les autres, c’est inverser les rôles. C’est oublier que sans vision, sans cohérence, sans structure, aucune alternance crédible ne peut émerger.

– Une scène finale sans générique – ou un constat d’impuissance ?

Le professeur Kamto n’a pas donné de consigne. Il a parlé, mais sans orienter. Il a laissé ses militants à leur propre conscience, comme un maître qui sait que l’heure de l’épreuve est venue. Ce silence, pour certains, est une leçon. Mais pour d’autres, il pourrait être un constat d’impuissance.

Kamto ne se tait pas pour tester ses partisans. Il se retire parce qu’il connaît l’issue : verrouillée, verrouillée d’avance. Le pouvoir a balisé le terrain, pipé les dés. Face à une opposition fragmentée, précipitée, incapable de bâtir un socle commun, il sait que rien ne changera — pas dans cette séquence.

Dans cette lecture, le silence n’est pas une épreuve spirituelle, mais une résignation stratégique. Une manière de ne pas cautionner une mascarade électorale. Je décline l’invitation : ce théâtre ne laisse aucune place à l’imprévu.

– Kamto reste fidèle à sa ligne : silence stratégique, appel à la cohérence –

Mais même dans cette posture, Kamto reste fidèle à sa ligne : ne pas trahir, ne pas se compromettre, ne pas se diluer. Il laisse chacun libre — non par faiblesse, mais parce que le vrai combat ne se joue pas dans cette séquence. Il se joue dans la durée, dans la cohérence, dans la capacité à reconstruire une opposition crédible.

Le MRC incarne l’alternance. On ne le relègue pas au rang de variable d’ajustement. Il impose sa place, au centre du jeu, pas en périphérie. Et si coalition il doit y avoir, elle ne peut se faire contre lui, ni à côté de lui — mais autour de lui.

Le maître est sorti du cinéma ABBIA. Pas d’applaudissements. Aucun signe d’hostilité. Juste un regard posé, puis le silence. Une présence, une retenue, une leçon. À ceux qui veulent comprendre, il a laissé un espace. À ceux qui veulent agir, il a laissé une responsabilité. Et à ceux qui veulent grandir, il a tendu un miroir — ou un constat.
Ce silence est une leçon. Et pour ceux qui savent écouter, peut-être un appel à grandir.

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