Le pape François, qui souffre d’une pneumonie, est mû par une énergie et un caractère têtu qui jusqu’ici ont été un moteur mais pourraient aussi s’avérer contreproductifs pour vaincre la maladie.
Le pontife de 88 ans a été admis à l’hôpital Gemelli de Rome vendredi dernier après avoir souffert pendant plusieurs jours de difficultés respiratoires et est apparu le visage pâle et gonflé.
S’il a reconnu être malade, il a travaillé jusqu’à la dernière minute, présidant même une messe en plein air dans un vent froid.
Sa bronchite initiale a évolué vers une pneumonie touchant les deux poumons, un « tableau clinique complexe » qui suscite des interrogations: pourquoi n’a t-il pas été contraint au repos, ou hospitalisé plus tôt?
Le pape argentin a toujours été clair sur son éthique de travail et sur le fait de vouloir garder les médecins à distance.
« Le médecin et moi nous portons mieux quand chacun reste chez soi! » plaisantait-il dans un livre-entretien en 2021 sur « La santé des papes ».
« Disons simplement que je ne suis pas un grand iatrophile », a-t-il affirmé à l’auteur de l’ouvrage, Nelson Castro, utilisant un terme rare pour décrire quelqu’un qui apprécie les médecins.
François, qui a connu ces dernières années une série de problèmes de santé – douleurs au genou et à la hanche, opérations de l’abdomen et du côlon) – est sensible aux infections respiratoires depuis l’ablation partielle de son poumon droit à 21 ans.
Lorsque Nelson Castro lui a demandé s’il était un bon patient, il a répondu : « Oui, mais j’ai mes limites ». Des limites que ses médecins ont découvertes très tôt.
Après un check-up en 2013 ayant révélé une ombre suspecte sur son poumon sain, François a refusé catégoriquement de passer une IRM nécessitant un liquide de contraste, disant au radiologue qu’il était allergique à l’iode.
« Surpris par mon refus catégorique, le radiologue a demandé au médecin du Vatican: +Alors, qu’allons-nous faire?+ » a raconté François.
« Ce à quoi le médecin a répondu: +Ecoutez, étant donné le caractère de ce pape, ne soyez pas surpris s’il se lève et s’en va. Il vaut mieux ne rien lui faire pour le moment+ ». « Ils ont dû penser que j’avais un sacré caractère! », a-t-il plaisanté.
– « Très têtu » –
En 2021, François a été pris en charge par un nouveau médecin personnel après le décès du précédent, mais selon certaines sources il a été ensuite discrètement écarté.
Le chef de l’Église catholique n’aime peut-être pas beaucoup les médecins, mais il a reconnu que des infirmiers lui ont sauvé la vie en deux occasions.
Et il est allé jusqu’à promouvoir l’un d’entre eux comme son « assistant personnel de soins de santé » en 2022.
Cette même année, le chef des services médicaux du club de football Atletico Madrid a été convoqué pour soigner le genou douloureux du pape. Jose Maria Villalon a alors confié que le pontife, qui souffrait d’arthrite, était « très gentil » mais aussi « très têtu », ajoutant qu' »il y a des options chirurgicales auxquelles il ne veut pas se soumettre ».
Par crainte de l’anesthésie générale, François a ainsi déclaré ne pas vouloir être opéré du genou, lançant qu’un verre de tequila ferait office d’antidouleur.
Cette obstination signifie aussi que, malgré sa sieste quotidienne, François s’est refusé à alléger un emploi du temps surchargé en dépit de son âge avancé et de quelques récentes chutes.
« Sa réponse à ceux qui lui conseillent d’être plus prudent a toujours été: +Je n’ai pas accepté d’être pape pour me reposer+ », a écrit le vaticaniste Iacopo Scaramuzzi mercredi dans le quotidien La Repubblica.
À l’hôpital, François semble suivre les instructions des médecins, même si selon le Vatican il alterne repos et travail.
Le théologien jésuite Antonio Spadaro, proche de François, a rappelé au quotidien Il Corriere della Sera que le pape « ne s’est jamais accordé une vraie coupure, il n’a pas pris de vacances depuis les années 1970 ».
Pour lui, François est doté d’une « énergie vitale extraordinaire », un atout face à la pneumonie. « Il n’est pas du genre à se laisser aller, ce n’est pas un homme résigné. Et c’est un élément très positif ».
Source: Agence France-Presse
















