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La rente diamantaire de l’Afrique australe menacée par les pierres de synthèse

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La rente diamantaire est en crise. Face à la montée des pierres de synthèse, les prix chutent. Les économies d’Afrique australe, comme celle du Botswana, en subissent les effets. Ce pays, jadis porté par l’éclat des diamants, voit sa prospérité fragilisée.

Deuxième producteur mondial de diamants derrière la Russie, le Botswana a vu sa note souveraine à long terme dégradée vendredi à « BBB » par l’agence S&P, qui a cité la « baisse des revenus diamantaires ».

En quête d’alternatives, ce pays enclavé de 2,5 millions d’habitants a lancé la semaine passée un nouveau fonds souverain visant à poser les « fondations d’un avenir » qui soit « diversifié au-delà des diamants ».

Parmi les options de l’ex-colonie britannique figurent déjà le tourisme de luxe orienté autour du safari, le cannabis médicinal et l’énergie solaire.

– le Botswana envisage de reprendre le contrôle de De Beers –

Le rachat par l’État du géant du secteur De Beers est aussi sur la table. Le président botswanais Duma Boko a évoqué la possibilité d’une participation majoritaire. Son gouvernement a engagé Lazard et la Compagnie bancaire helvétique (CBH) pour le conseiller en la matière.

Brendon Verster est économiste chez Oxford Economics Africa. Il estime que plusieurs pays sont exposés à la crise du diamant. L’Angola, la Namibie et l’Afrique du Sud sont concernées. Mais selon lui, aucun n’est aussi vulnérable que le Botswana. Il a partagé cette analyse avec l’AFP.

Les diamants dominent l’économie du Botswana. Ils représentent 30 % du produit intérieur brut. Ils comptent pour 80 % des exportations nationales. Le Fonds monétaire international confirme ces chiffres.

Les diamants synthétiques gagnent du terrain. Fabriqués en Chine et en Inde, ils coûtent moins cher. De plus en plus de consommateurs les choisissent. Conséquence : le prix moyen d’un diamant naturel d’un carat diminue. Le marché s’ajuste face à cette nouvelle concurrence.

Le prix du diamant a fortement baissé. En mai 2022, il atteignait 6 819 dollars. En décembre 2024, il est tombé à 4 997 dollars. Le World Diamond Council rapporte cette chute. L’organisation patronale du secteur y voit un signal d’alerte.

Le Botswana est composé à 70 % de désert. Dans les années 1960, le pays a découvert des gisements de diamants. Cette découverte a permis de sortir de la pauvreté. Aujourd’hui, l’économie dépend fortement de cette ressource.

– « Risques d’effondrement économique » –

Les réserves de devises s’épuisant, le gouvernement s’est endetté pour remplir les caisses publiques.

En août, le système de santé a vacillé. Duma Boko a déclaré l’état d’urgence sanitaire. Le pays faisait face à une pénurie de médicaments essentiels. Les hôpitaux ont été durement touchés. La crise a révélé les failles du secteur médical.

Le chef d’État a lancé un avertissement en juillet. Il estime que la crise dépasse le cadre économique. Sans action, elle pourrait devenir une bombe sociale à retardement. Le risque est réel, selon ses mots.

« En substance, c’est maintenant ou jamais » que le Botswana doit se diversifier, juge Brendon Verster.

Les pierres synthétiques gagnent du terrain. Elles représentent environ 20 % du marché mondial en valeur cette année. Aux États-Unis, elles atteignent jusqu’à 50 % du volume dans le secteur des bagues de fiançailles. L’agence S&P souligne cette progression.

« On ne voit vraiment pas ce qui pourrait provoquer un revirement radical en faveur des diamants naturels », analyse Brendon Verster.

D’autres pays de la région sont en souffrance, comme le Lesotho. Les diamants contribuent jusqu’à 10 % du modeste PIB – environ 2 milliards de dollars (1,7 milliard d’euros) – de ce territoire montagneux, dont la principale industrie, le textile, pâtit des nouvelles taxes douanières américaines.

La mine de diamants Letseng est la plus grande du pays. Ce mois-ci, elle a annoncé une réduction de 20 % de ses effectifs. Motif : une pression continue sur les prix et un ralentissement de la demande. Les principaux marchés sont touchés. L’entreprise ajuste sa stratégie face à la crise.

Thabo Qhesi est analyste économique indépendant. Il alerte sur les fermetures de mines. Selon lui, elles pourraient accroître les risques d’effondrement économique. Il invite à explorer une alternative : les terres rares. Ces métaux stratégiques offrent un potentiel économique à long terme.

– Campagne de promotion –

En juin, cinq pays africains ont pris un engagement commun. L’Angola, le Botswana, la Namibie, l’Afrique du Sud et la RDC vont consacrer 1 % de leurs revenus issus du diamant à sa promotion. Objectif : préserver l’éclat des pierres naturelles auprès du public. Cette initiative vise à renforcer la valeur perçue des diamants responsables.

L’actrice britannique Lily James est ambassadrice de la campagne. Son objectif : redonner aux diamants leur statut de produit de luxe. Keith Jefferis, ancien vice-gouverneur de la Banque du Botswana, l’a expliqué à l’AFP. La campagne mise sur l’image, l’origine et la traçabilité des pierres.

De Beers participe à la campagne. L’entreprise y voit une opportunité de sensibilisation. Objectif : raconter l’histoire des diamants issus de filières responsables au Botswana. La déclaration a été transmise à l’AFP.

Jacob Thamage représente le ministère des Minéraux du Botswana. Selon lui, les diamants naturels et synthétiques visent des publics différents. Ils peuvent coexister sur le marché. Chaque type répond à une demande spécifique.

Dans un centre commercial haut de gamme de Johannesburg (Afrique du Sud), un diamant jaune naturel d’une valeur de plus de 50 000 dollars (près de 43 000 euros) cohabite avec un diamant synthétique de 115 dollars (98 euros) un peu plus loin. À la différence que le premier est barricadé derrière des portes en acier renforcé.

« Chacun sa cible », résume un bijoutier. « Tant que tout le monde s’y retrouve. »

Source : Agence France-Presse

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