Joseph Kabila devenu paria, fait désormais face à une condamnation à mort. Il a dirigé la RDC de 2001 à 2019. En 2023, il quitte le pays. Pourtant, il réapparaît récemment, ravivant les tensions à Kinshasa.
Fils de Laurent-Désiré Kabila, rebelle ayant fait tomber le dictateur Mobutu Sese Seko, Joseph Kabila, 54 ans, avait hérité du pouvoir en République démocratique du Congo (RDC) par une succession de type monarchique après l’assassinat de son père en janvier 2001.
« Avec sa voix timide et sa jeunesse (il n’avait alors que 29 ans), il donnait l’impression au début d’être un personnage falot », écrit l’historien belge David Van Reybrouck dans un ouvrage de référence sur le Congo.
En 2019, au terme de deux mandats, Joseph Kabila quitte le pouvoir en laissant la place à l’actuel président Félix Tshisekedi et avec le statut de sénateur à vie ainsi qu’une immunité parlementaire. En 2023, il quitte le pays et reste discret sur ses déplacements, apparaissant notamment en Afrique du Sud ou en Namibie.
– Condamnation pour trahison –
Après s’être tenu à l’écart pendant plusieurs années, il réapparait fin mai à Goma, ville sous contrôle du groupe armé antigouvernemental M23 depuis fin janvier. Même silhouette carrée, son habituelle barbe en moins. Quelques jours auparavant, l’ex-président, qui jouit encore d’un important réseau d’influence, avait déclaré dans une rare allocution en ligne que « la dictature doit prendre fin » en RDC et qu’il est prêt à « jouer sa partition ».
Ce retour bref de Joseph Kabila au pays a inquiété Kinshasa. Le contexte était déjà tendu, marqué par l’intensification du conflit dans l’est de la RDC. En réaction, le gouvernement a levé son immunité parlementaire. Ensuite, la Haute Cour militaire l’a jugé par contumace. Mardi 30 septembre 2025, elle l’a condamné à mort pour trahison et crimes de guerre.
Joseph Kabila naît le 4 juin 1971 dans le maquis de son père, Laurent-Désiré Kabila, au Sud-Kivu. À cinq ans, il part en exil. Il passe presque toute sa jeunesse en Tanzanie. Puis, en septembre 1996, il rejoint son père. À ce moment-là, la première guerre du Congo éclate.
Il part en Chine pour suivre une formation militaire. Mais dès le début de la deuxième guerre du Congo, en 1998, il rentre précipitamment. Ensuite, il rejoint l’armée.
À la mort de son père, Joseph Kabila hérite d’un pays exsangue. La guerre, commencée en 1998, ravage la RDC. Elle ne prend fin qu’en 2003. À ce moment-là, le pouvoir central contrôle à peine l’ouest et le sud du pays. Pourtant, la RDC possède d’immenses ressources naturelles. Malgré cela, elle reste l’un des pays les plus pauvres du monde.
– « Un homme de l’Est »-
Joseph Kabila parle anglais et swahili, deux langues de l’Est africain. En revanche, il s’exprime difficilement en français, pourtant langue officielle en RDC. De plus, il ne maîtrise pas le lingala, parlé à Kinshasa.
Sa maîtrise limitée du français, son lieu de naissance dans l’est de la RDC et son enfance en Tanzanie alimentent les préjugés. À Kinshasa, beaucoup le perçoivent comme un homme de l’Est, voire comme un étranger.
Peu à peu, Joseph Kabila surprend les diplomates étrangers. Ils le voyaient comme un pantin manipulé par la vieille garde de son père. Pourtant, il s’en affranchit progressivement et affirme son propre style politique.
Après une transition post-conflit difficile, Joseph Kabila doit cohabiter avec quatre vice-présidents. En 2006, il se présente aux premières élections libres depuis l’indépendance en 1960. Il les remporte et confirme sa place à la tête de l’État.
– Un homme discret et réservé –
L’état de grâce ne dure pas. En 2011, Joseph Kabila remporte un second mandat à l’issue d’élections entachées d’irrégularités. Il obtient une majorité relative. À Kinshasa, ville de près de 17 millions d’habitants, il ne convainc que 16,5 % des électeurs. Le rejet est massif.
Sa victoire, contestée par la majeure partie de l’opposition, plonge le Congo dans la crise politique. En 2015, le pouvoir tente de modifier la loi électorale. L’objectif : permettre à Joseph Kabila de rester au-delà des deux mandats prévus par la Constitution. Cette initiative provoque des manifestations. Les violences font des dizaines de morts. Finalement, Joseph Kabila renonce à se présenter en 2018.
Joseph Kabila reste solitaire et secret, même pour ses proches. Il évite les cérémonies officielles, où il semble mal à l’aise. En revanche, il paraît plus détendu lorsqu’il conduit des tracteurs ou des engins de chantier, notamment lors d’inaugurations.
Peu attiré par la littérature, selon un diplomate qui l’a rencontré plusieurs fois, Joseph Kabila préfère les jeux vidéo et les voitures. Ce goût personnel contraste avec l’image traditionnelle des chefs d’État. Il est marié et a deux enfants.
Source : Agence France-Presse